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L’interview de Victor Demonchaux, co-fondateur d’Ambrosia, le premier Plan Epargne en cryptomonnaie

Après avoir découvert le monde des grandes entreprises au cours de 3 stages (Carrefour et Vinci notamment), Victor Demonchaux se rend à l’évidence : le salariat n’est pas fait pour lui. Emmouscaillé par la hiérarchie et refusant de se voir dicter le programme de ses journée, Victor opte pour l’entrepreneuriat. En alumni d’emlyon, cet entrepreneur dans l’âme co-fonde en 2021 Ambrosia, le premier Plan Épargne Crypto des Français. Victor Demonchaux a accepté d’offrir au M quelques minutes de son précieux temps.

Propos recueillis par Houssam Nobbigh,

Le M : Bonjour Victor, d’où vient ton goût pour l’entrepreneuriat ?

Victor Demonchaux : J’ai passé 3 ans à l’emlyon au cours desquels j’ai pu effectuer différents stages dans de grands groupes. J’ai, à chaque fois, fait le même constat. Le salariat n’était pas fait pour moi, j’avais beaucoup de mal avec la hiérarchie et le fait que ma journée soit dictée par quelqu’un d’autre. A la fin de mon cursus à emlyon je savais une chose : il fallait que je lance mon propre projet mais il fallait surtout que cela soit sur une thématique qui m’anime. J’avais l’embarras du choix entre la cuisine, le sport mais aussi le monde de l’investissement et des finances. Mais le sujet de la cryptomonnaie m’intéressait plus que tout à ce moment-là. J’ai alors commencé à réfléchir à un projet autour de l’investissement en crypto monnaie, j’ai commencé par discuter avec des amis, des personnes impliqués dans cet écosystème. Finalement, j’ai créé Ambrosia après avoir été diplômé d’emlyon avec deux autres associés : un ingénieur et un avocat.

Comment as-tu trouvé tes associés pour le projet Ambrosia ?

Je fais beaucoup de sport, dont le tennis principalement. Pour gagner un peu d’argent de poche durant mes études, j’ai été professeur de tennis pour des particuliers. A cette époque, je n’arrêtais pas de parler de cryptomonnaie à tout le monde, ma vie était cryptomonnaie ! Et parmi ces personnes, qui m’écoutaient, il y avait mes élèves. L’un d’entre eux – qui était avocat – m’a alors dit « Ok, c’est intéressant ce que tu développes, on se pose pour que tu puisses m’expliquer en détail en quoi cela consiste ? » ; finalement il a adoré tout l’écosystème, il a approfondi le sujet et nous nous sommes dit “OK, on va monter le projet ensemble”. C’est très pertinent d’avoir un avocat auprès de soi, surtout en dans le milieu des crypto-monnaies où il est nécessaire d’avoir une régulation sur les services financiers !

“En l’espace de quelques mois en montant ma propre boîte, j’ai pu apprendre beaucoup plus que durant toute ma scolarité !”

Rapidement, nous avons identifié un besoin technique afin de développer toute l’infrastructure technique. Nous avons alors présenté notre projet dans un groupe de discussion en ligne. Rapidement, un étudiant de l’école Centrale de Lyon m’a mis en relation avec un ami à lui de étudiant de l’école Centrale de Paris ; le réseau emlyon m’a été plutôt utile pour trouver mon associé technique.

Si l’on revient sur ton parcours, y’a-t-il eu des cours qui t’ont aidé à te lancer dans ton projet ? On pense en particulier à l’univers de la cryptomonnaie.

“En l’espace de quelques mois en montant ma propre boîte, j’ai pu apprendre beaucoup plus que durant toute ma scolarité !” Malgré l’engagement des écoles de commerce à vouloir développer des cours moins théoriques mais plus pratiques, cela reste selon moi insuffisant. Ce n’est qu’en lançant son propre projet que l’on se rend compte de ce qu’est l’entrepreneuriat.

“Le bitcoin est une monnaie pertinente aujourd’hui, et le sera d’autant plus à l’avenir.”

Au-delà de ça, je trouve les écoles de commerce un peu réfractaires vis-à-vis de tout l’écosystème de la cryptomonnaie : très peu de cours sont dispensés sur ces sujets  aujourd’hui, peu d’associations traitent cette thématique. Certes, il y a des efforts en ce sens mais cela reste timide, et je pense qu’il reste encore beaucoup à faire.

Il est vrai qu’il serait très profitable pour les étudiants de développer des cours sur la blockchain ! A ce sujet pourrais-tu nous en dire un peu plus sur ce qu’il est possible de faire avec la cryptomonnaie aujourd’hui ?

Pour comprendre facilement, il faut avant tout se demander ce qu’est le bitcoin et l’impact de sa révolution : le bitcoin est une monnaie complètement décentralisée et non émise par un tiers de confiance – à la différence de l’euro, qui dépend de la Banque Centrale Européenne. Le bitcoin est un outil très puissant de par sa décentralisation, mais il est aussi rare du fait que le nombre d’unités de Bitcoin soit limité – contrairement aux monnaies classiques telles que l’euro ou le dollar pour lesquelles l’émission est sans limite. Cette émission sans limite donne d’ailleurs une première explication de l’inflation que nous connaissons aujourd’hui en Europe. Le bitcoin est une monnaie pertinente aujourd’hui, et le sera d’autant plus à l’avenir.

On observe aujourd’hui un développement sans précédent de nouvelles cryptomonnaies, avec un intérêt nouveau pour la DeFi (ou finance décentralisée) : ton projet Ambrosia est axé sur la DeFi, pourrais-tu nous présenter ton projet ?

Les monnaies numériques sont décentralisées par essence puisqu’elles ne sont pas émises par un tiers de confiance. Néanmoins aujourd’hui, pour pouvoir acquérir des cryptomonnaies actives, il faut principalement passer par des plateformes qui, elles, sont centralisées (Binance, Coinbase par exemple). L’inconvénient majeur de passer par ces plateformes centralisées est qu’elles peuvent, d’un point de vue technique, s’emparer de vos crypto-monnaies pour les exporter ailleurs et/ou, sur demande de l’Etat, peuvent geler vos avoirs. Depuis 2020, un écosystème parallèle s’est mis en place : la DeFi. Celle-ci permet à n’importe qui de pouvoir échanger et acquérir des crypto actifs sans l’intermédiaire de plateformes.

Logo Ambrosia.
Crédits : Ambrosia.

Chez Ambrosia, nous sommes partis du constat que les produits d’épargne traditionnels comme le livret A, le PEL, ou les fonds euros de nos assurances-vie ne sont pas assez rentables. En France, on adore ces produits, ils garantissent une certaine liquidité et sont assez sécurisés, mais face à une inflation galopante il est primordial d’essayer d’obtenir une meilleure rentabilité. En effet, ces fonds nous font même perdre de l’argent avec une inflation aujourd’hui supérieure à 7.5% (contre une rentabilité en moyenne de 1% sur les fonds sécurisés). L’injection de liquidité depuis la crise sanitaire a fait augmenter cette inflation qui continue de croître jour après jour. En conclusion, nous pouvons dire que mettre de l’argent sur un livret nous fait perdre du pouvoir d’achat.

L’idée d’Ambrosia est alors de proposer une solution d’épargne qui fonctionne comme un livret A, c’est-à-dire une solution gratuite pour l’utilisateur. Ambrosia propose une solution liquide pour pouvoir récupérer ses avoirs à tout moment, une solution sécurisée, et enfin une solution mieux rémunérée que les produits d’épargne traditionnelle. Nous proposons en effet un taux de rendement de l’ordre de 6% par an.

Ce rendement fonctionne sur de l’investissement sur des crypto-monnaies. Pourriez-vous nous expliquer comment cela fonctionne ?

Les cryptomonnaies se décomposent en 2 grandes classes d’actifs : d’un côté nous avons les cryptomonnaies volatiles qui sont des actifs risqués (exemple du bitcoin, ethereum etc..), de l’autre côté il existe des stablecoin qui sont des actifs stables et qui ne fluctuent pas.

Chez Ambrosia, nous avons décidé de nous concentrer uniquement sur les stablecoin. Celles-ci sont adossées à une monnaie fiduciaire le plus souvent et plus particulièrement au dollar américain (on voit aussi se développer depuis peu les stablecoin euros). Ainsi, pour faire travailler ces stablecoin, c’est-à-dire pouvoir générer un rendement sur celles-ci, nous allons les emmener vers la finance décentralisée. Ce système financier est intégralement automatisé et ne nécessite pas l’intervention d’un intermédiaire, du fait de la technologie de la blockchain et des Smart contracts (contrats intelligents). Plus précisément, nous dirigeons ces stablecoin vers des protocoles qui vont nous permettre de les prêter à d’autres pairs sur la finance décentralisée. 

Aussi, tout comme la finance traditionnelle, les personnes qui vont emprunter nos stablecoin, vont devoir payer des intérêts qui vont générer le “yield” (rendement) que nous reversons à nos clients. Par ailleurs, ces mêmes personnes doivent déposer un “collatéral” (une caution ou hypothèque que conserve la blockchain tant que les dettes ne sont pas remboursées), qui sera une garantie pour le prêteur. Ainsi, si un emprunteur souhaite obtenir 10 000€ de stablecoin, celui-ci se doit de déposer en contrepartie au moins 10 000€ de crypto actif sur la finance décentralisée. En conclusion, l’emprunt sur la DeFi est réservé aux personnes disposant déjà de liquidités.

Illustration stablecoin. Crédits : Coinbase.

Le livret proposé par Ambrosia apporte une garantie de sécurité par la présence du collatéral pour un emprunt, pour autant peut-on dire que le portefeuille est liquide ?

C’est tout l’avantage de notre produit ! Premièrement il est mieux rémunéré qu’un livret A mais aussi et surtout, le portefeuille est très liquide ! À tout moment, le client, s’il le souhaite, peut récupérer son argent. Nous pouvons lui donner ses liquidités sous forme d’euros dans un délai de 48h dans son compte bancaire. 

En comparaison, pour générer un rendement de 6% par an dans la finance traditionnelle, il est souvent demandé d’avoir un horizon de placement sur du moyen, voire long terme – le portefeuille va fluctuer pour aboutir à ce taux moyen. A l’inverse Ambrosia propose ce rendement, mais sur du court terme.

“Nous souhaitons vulgariser ces notions de DeFi et de stablecoin, afin d’augmenter la confiance que les investisseurs peuvent avoir pour Ambrosia.”

In fine, peut-on dire que c’est une solution pour diversifier son portefeuille ?

Nos clients cibles sont les jeunes actifs qui commencent à épargner leurs patrimoines. Généralement, notre clientèle a déjà un patrimoine net supérieur à la moyenne des Français. C’est aussi une clientèle qui est très active et qui n’a pas le temps de gérer ses actifs financiers. Le plus souvent, ces investisseurs passent par des conseillers en gestion de patrimoine pour diversifier leurs actifs. Le conseiller leur propose ainsi une multitude de produits entre de l’immobilier, de la bourse, de l’assurance-vie etc… Malheureusement la classe d’actif des crypto-monnaies est encore beaucoup trop négligée par ces conseillers en gestion de patrimoine. 

Pourquoi ?

  1. Les conseillers en gestion de patrimoine ne sont pas les plus à même de connaître cet écosystème.
  2. Ils ne sont pas habilités à le faire car en France, pour proposer des investissements sur des crypto actifs, il faut être régulé auprès de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). Il faut alors obtenir le statut de PSAN (Prestataires de Services sur Actifs Numériques).

La proposition d’Ambrosia est donc de commercialiser son plan d’épargne crypto via des conseillers en gestion de patrimoine car Ambrosia aura le PSAN mais pas les conseillers.

Qu’en est-il du projet aujourd’hui ? A-t-il été lancé ?

Le projet a moins de 1 an, il est assez récent. Ces derniers mois ont été principalement consacrés à consolider l’aspect réglementaire : obtenir le “saint graal” qui est le statut de PSAN. Ambrosia se positionne pour obtenir ce statut en juin/juillet 2022. Et à partir de cet été, nous allons pouvoir lancer notre produit à grande échelle. En attendant, aujourd’hui, l’objectif pour nous est de construire une communauté et commencer à nous faire connaître afin d’avoir un maximum d’individus qui vont s’inscrire sur notre liste d’attente. Nous souhaitons vulgariser ces notions de DeFi et de stablecoin, afin d’augmenter la confiance que les investisseurs peuvent avoir pour Ambrosia.

“Tous les moments sont bons pour investir peu importe le contexte économique et social, si l’on se projette sur une optique long terme !”

Pour conclure, on pense à nos étudiants emlyiens, aurais-tu des conseils à leur donner pour commencer à investir ?

De manière générale, pour pouvoir investir, il faut être capable d’économiser et de mettre de l’argent de côté chaque mois : le principe d’épargne, c’est la base de l’investissement. Ensuite pour l’investissement en tant que tel, il faut savoir que plus on commence à investir tôt et plus on arrivera à tirer des plus-values et/ou des intérêts intéressants sur le long terme.

Au-delà de cela, nous avons tendance à nous demander : quand acheter ? Est-ce le bon moment pour investir ? Combien mettre ? Ce que je peux dire par-là c’est qu’il n’y a pas de bons moments pour investir, à partir du moment où l’on a une vision à long-terme. Tous les moments sont bons pour investir peu importe le contexte économique et social, si l’on se projette sur une optique long terme !

Enfin, dernier conseil, à partir du moment où l’on accumule 100€, 1000€, 10 000€ ou même 100 000€ : il ne faut jamais investir cette somme au même moment, soyez prêt à répartir cet investissement sur une période donnée afin de lisser l’enveloppe sur le prix d’achat. Le DCA (Dollar Cost Averaging) permet donc de minimiser le risque lié à la volatilité du marché.

Victor Demonchaux reçu par Jean-Marc Sylvestre dans ENJEUX & PRIORITÉS sur Bsmart le 4 mars 2022. Crédits : Bsmart.

…un conseil pour les futurs entrepreneurs ?

Il faut se lancer ! L’entrepreneuriat, par principe, c’est de se prendre des murs tous les jours. Si vous avez une idée en tête, n’attendez pas forcément d’avoir du temps, d’avoir obtenu un CDI, d’avoir remboursé votre prêt. Non ! Tentez votre chance, à votre âge on n’est pas pressé de rentrer dans la vie active, alors lancez-vous !