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Le conseil interne chez la Banque Postale Consulting avec Wafaa Belkaim

Après 3 ans de classe préparatoire ECE, Wafaa Belkaim intègre emlyon en 2014. Elle construit son parcours autour de la finance d’entreprise et complémente sa formation par un double-diplôme en droit privé dans le cadre d’un partenariat entre emlyon et l’Université Lumière Lyon 2. Son premier stage au sein d’une start-up (Arc-en-Ciel d’intérieur) fondée par un alumni d’emlyon en tant qu’assistante du DAF (Directeur Administratif et Financier) la conforte dans son idée de faire de la finance d’entreprise son domaine d’expertise. Wafaa poursuit par un stage au sein de BNP Paribas en tant que Corporate Coverage EMEA Analyst intern puis termine son parcours à emlyon par un stage en fusion-acquisition au sein du Crédit Agricole. Après être passée par un cabinet de conseil en stratégie spécialisé dans le secteur pharmaceutique (CEPTON Strategies), Wafaa intègre La Banque Postale pour y occuper un poste de consultante interne, chargée de l’accompagnement des Directions de la Banque dans leurs projets de transformations. Le M l’a rencontrée. 

Propos recueillis par Manon Bariteau,

Le M : Bonjour Wafaa, vous avez choisi de travailler dans le secteur de la Banque, pourquoi ?

Wafaa Belkaim : Quand j’ai intégré emlyon, je souhaitais travailler dans les fusions-acquisitions, c’est pourquoi je me suis tournée, assez naturellement, vers le secteur de la banque. C’est ici que se font les opérations. Je trouve également que le secteur de la banque offre une ouverture sur beaucoup de sujets différents. En banque de détail, nous bénéficions d’une ouverture sur les sujets privés, nous comprenons comment fonctionne la société et les personnes physiques à travers les produits : épargne, les besoins de financement, l’assurance vie, etc. En ce qui concerne les entreprises, nous les accompagnons dans leur développement et nous avons une vision de leurs besoins. Toute entité, personne physique ou morale, a affaire à la banque. J’aimais beaucoup le fait d’être liée à plusieurs domaines au sein d’une même entité.

Votre métier de consultante est un métier très prisé des étudiants en école de commerce. Cependant, beaucoup ne savent pas ce qu’est vraiment le Conseil, et leur vision est encore assez floue sur le sujet. Pourriez-vous nous éclairer sur votre métier ?

Tout d’abord, le conseil est un mot un peu fourre-tout qui réunit plusieurs réalités. Il existe deux grands types de conseil : le conseil en organisation (ou conseil en management) et le conseil en stratégie. Le conseil en organisation correspond à la déclinaison des plans stratégiques. Il désigne l’accompagnement de projets au sein d’entités dans lesquelles on peut intervenir. Le conseil en stratégie est plus ponctuel, il dure entre 3 à 6 mois et permet de donner une direction à la société, de fixer des objectifs. Une fois que le conseil en stratégie est intervenu, le conseil en organisation intervient pour déployer les stratégies qui ont été préconisées. 

Dans le cas du conseil en stratégie, le travail se fait beaucoup « en chambre », c’est-à-dire au sein du cabinet. Il consiste à collecter des données, faire des analyses pour extraire des conclusions et des plans d’actions. En revanche, dans le conseil en organisation, le travail se fait avec le client : nous sommes intégrés aux équipes et il s’agit davantage d’un travail opérationnel qui s’étale entre 6 mois et 2 ans. 

Comment avez-vous découvert ce métier ? Était-ce quelque chose que vous connaissiez et que vous souhaitiez faire avant de rentrer à emlyon ?

En entrant à emlyon, je souhaitais travailler dans les fusions-acquisitions. Lors de mon stage en fusion-acquisition, beaucoup de choses m’ont plu : j’ai travaillé dans différents secteurs, ce que j’ai vraiment apprécié, et j’ai aussi traité des sujets un peu sensibles. D’autres choses m’ont un peu moins plu : nous avions peu de vision sur ce qu’il se passait dans l’entreprise une fois que la fusion était faite, les missions étaient très courtes et le rythme de vie était assez intense ce qui correspondait moins à ce que je cherchais. 

Après mon stage dans ce domaine, j’ai donc choisi le conseil : cela me permettait d’avoir une vision un peu plus long terme sur les projets et d’avoir un rythme de vie qui me correspondait davantage. J’ai d’ailleurs découvert le conseil avec les cours d’emlyon et notamment le cours PCE : avec mon groupe, nous avions voulu conseiller Emaüs Lyon qui souhaitait augmenter son chiffre d’affaires pour pouvoir accueillir 30 nouveaux compagnons. Le projet n’a finalement pas été retenu pour le cours PCE mais nous avons tout de même mené à bien ce projet de manière bénévole.

Aujourd’hui, quelle est la journée type ou les missions typiques de la consultante chez la Banque Postale Consulting ?

Dans le conseil, il n’y a pas vraiment de mission type. S’il fallait décrire un projet type, il débuterait par la présentation des objectifs à atteindre, puis une phase de diagnostic pour connaître les tendances du moment et quels sont les écarts avec nos objectifs. Notre métier consiste alors à trouver les moyens pour concilier objectifs de l’entreprise et ce qu’il se fait sur son marché en mettant en place des plans d’action.

Plusieurs instances prennent part au projet : le projet est suivi par les dirigeants de la banque postale via des comités réguliers qui statuent sur des points clés, puis par les consultants et les opérationnels. Nous sommes en lien avec différents services : nous, les consultants, ne sommes pas forcément les « sachants » sur les différents volets de notre mission. Il est donc nécessaire d’intégrer de nouvelles personnes dans nos missions pour qu’elles nous apportent leurs connaissances et un certain éclairage

Notre métier est donc un métier de synthèse et de planification. Il s’agit d’un déploiement pour atteindre les objectifs fixés en début de mission. 

Siege social de la Banque Postale. Crédits : Pascal SITTLER/REA.

Selon le site de la Banque Postale Consulting, vous êtes une dizaine de consultants à travailler pour cette branche de la Banque Postale. Est-ce un choix délibéré de la Banque Postale de confier des missions à une équipe restreinte, ou est-ce quelque chose de courant dans le Conseil ? Quels sont les avantages à travailler en petit comité ?

Il n’est pas forcément courant d’avoir de petits comités dans le conseil : la société générale a par exemple une structure interne de conseil avec des équipes composées de plus d’une centaine de personnes. 

Aujourd’hui, nous sommes une vingtaine. Cela s’explique par deux choses : la banque est jeune (16 ans) donc elle se structure encore et le cabinet a été créé en 2013. Le cabinet est amené à s’agrandir mais l’objectif de la Banque Postale Consulting est d’abord d’avoir de travailler sur des missions stratégiques intéressantes qui ont une forte valeur ajoutée.

De manière générale, le nombre de consultants, même dans les gros cabinets, ne change pas grand-chose au travail au quotidien puisque les équipes sont déterminées par les projets sur lesquels elles travaillent et sont donc restreintes. La différence concerne plutôt le nombre de missions qui seront peut-être plus nombreuses dans des cabinets plus importants. 

Pourquoi La Banque Postale a-t-elle créé une branche de conseil en interne, au lieu de faire appel à des cabinets de conseil externes comme le font de nombreuses entreprises ?

En général, les entreprises créent des cabinets de conseil interne pour trois raisons : 

• La préservation des données et des savoirs : lorsqu’une entreprise fait appel à un consultant externe, il finit par quitter la mission et emmène le savoir qu’il a acquis avec lui

• La deuxième raison peut être d’ordre économique : il est plus rentable de créer une branche consulting interne.

• Enfin, la connaissance du groupe augmente au fur et à mesure des missions ce qui peut représenter un gain de temps lorsque débute une nouvelle mission : il y a une phase d’adaptation moindre par rapport à un consultant externe.

Vous faites partie de l’AFCI, l’association française du conseil interne. Quelle est cette association et à quoi sert-elle ?

L’AFCI est une association qui réunit plusieurs groupes qui possèdent des cabinets de conseil interne. L’objectif de l’association est de promouvoir des façons de faire, de mettre en commun des ressources, de mutualiser des formations et de promouvoir une vision commune sur le conseil interne.

Beaucoup d’étudiants souhaitent effectuer leur stage dans le secteur du conseil. Que leur conseillez-vous ? Y a-t-il un parcours, une entreprise, ou un pays idéal pour réussir dans ce secteur ?

Je ne pense pas qu’il y ait de parcours type : les cabinets de conseil sont assez ouverts dans leurs recrutements. Plus l’expérience est riche, plus les stages ont été réalisés dans de grosses entreprises, plus le stagiaire a eu des responsabilités, a été autonome, plus il est intéressant pour un cabinet de vous recruter.

Au-delà du conseil, je pense qu’il faut tester plusieurs tailles d’entreprises, plusieurs secteurs, plusieurs métiers, pour savoir ce que l’on aime le plus ou le moins et avoir une idée de ce que l’on veut faire par la suite. 

Vous avez été M&A Analyst Intern chez Crédit Agricole avant de devenir consultante. En quoi cela consistait-il ? Quel est le lien avec votre métier aujourd’hui ?

M&A Analyst Intern correspond à analyste en fusion-acquisition. Le travail au quotidien consiste à donner une vision d’une entreprise aux dirigeants et aux banquiers. Cela se traduit par des analyses financières, des analyses sectorielles, et requiert une très bonne organisation pour présenter de manière synthétique mais intéressante les entreprises dont on s’occupe. Le lien avec mon métier aujourd’hui est assez faible si on prend le métier en tant que tel : je ne fais pas du tout les mêmes tâches qu’avant. Mais ce qui est universel est la capacité à s’organiser, à synthétiser ses idées et à présenter des diapositives claires sans perdre trop d’informations.

Quels sont les hard skills et les soft skills nécessaires pour travailler dans ce secteur ?

En ce qui concerne les hard skills du consultant, les deux premières sont de produire des diapositives claires, synthétiques et qui aident à la prise de décision et d’avoir des capacités d’analyse.  

Les soft skills du consultant sont : 

• La curiosité : lorsqu’un consultant débute une mission, il ne connaît rien et doit acquérir beaucoup de compétences. 

• La capacité à évoluer dans l’inconnu et à s’adapter : souvent, le consultant est amené à faire des choses qu’il n’a pas faites par le passé et il doit s’adapter à la demande. 

Il me semble aussi que vous avez travaillé pour la BNP, le Crédit Agricole et vous êtes aujourd’hui à la Banque Postale. Comment êtes-vous arrivée à ce poste et pourquoi cette entreprise en particulier ?

J’ai été attirée par la jeunesse de la Banque Postale : les problématiques ne sont pas les mêmes à la BNP ou au Crédit Agricole. Pour la Banque Postale, il s’agit de croître, de gagner des parts de marché, de développer de nouvelles activités. Nous sommes dans la création et la structuration de nos activités plus que dans des missions de réduction de coûts. Les sujets de croissance sont des sujets qui m’intéressent.

La deuxième raison est l’engagement citoyen de la Banque Postale : la Banque Postale ouvre des comptes à des citoyens qui ne sont pas acceptés dans d’autres banques. Cela correspondait à mon envie d’avoir un impact à mon échelle sur la société. 

Le secteur de la Banque fait face à un défi réglementaire.
Crédits : BankObserver.

Comment envisagez-vous la suite de votre carrière chez la Banque Postale Consulting ? 

Cela fait un an que je suis à la Banque Postale et je m’y plais : je suis sur une mission intéressante, l’environnement dans lequel je travaille est assez bienveillant et le cabinet est en train de croire. Je souhaite rester le plus longtemps possible à la Banque Postale. En revanche, je peux envisager d’évoluer au sein du groupe mais ce n’est pas pour l’instant dans mes projets.

Quels sont les principaux défis auxquels votre secteur (la Banque) doit et devra faire face dans les années à venir ?

Je pense que le secteur de la banque a deux défis aujourd’hui : 

  • Le défi réglementaire. Suite aux crises financières, de nombreuses réglementations ont été imposées à la banque. Il faut les mettre en place, les suivre, modifier des process. Cela représente un coût sur le résultat de la banque.
  • Le marché. Aujourd’hui, il y a beaucoup de banques : de grosses banques comme la BNP, le Crédit Agricole, la Société Générale mais aussi des fintech comme Lidya, les entreprises qui font du paiement fractionné, et les banques en ligne. Il y a donc beaucoup de concurrence. Les banques traditionnelles doivent s’interroger sur les valeurs qu’elles apportent et sur ce pourquoi elles doivent être rémunérées. 

Ancienne étudiante à emlyon, vous connaissez la richesse du tissu associatif ! Dans quelle association étiez-vous engagée à cette époque ? 

A l’époque j’étais au Bureau Des Internationaux et je m’occupais des ApéRoadtrips. C’était une expérience que j’aimais beaucoup parce qu’elle m’a permis de rencontrer plein de gens du monde entier et me permettait de pratiquer mon anglais de manière très terre à terre. Il y avait aussi tout le volet organisationnel que je retrouve aujourd’hui dans mon métier et qui m’a, je pense, formé à ce que je fais aujourd’hui.

Aujourd’hui je fais partie d’Article1, une association qui vise à accompagner les jeunes de milieux défavorisés et qui propose un système de mentorat pour ces jeunes. 

Pour finir, si vous aviez un mot pour définir votre métier aujourd’hui, quel serait-il ?

Polyvalence. Comme je le disais, il faut savoir s’adapter en permanence, être à l’écoute, prendre en compte les informations que l’on récupère.