Décryptons le profil international d’emlyon business school à travers sa faculté et sa recherche incarnées par des équipes d’enseignants, de chercheurs et de professeurs-chercheurs
emlyon business school est une école de rang mondial. Son rayonnement international passe également par la production de savoirs qui viennent alimenter « la conversation scientifique mondiale et le débat économique et social ». Cette capacité de production de connaissances est portée par une équipe de professeurs-chercheurs compétents, issus de 25 nationalités différentes et positionnés sur différents champs disciplinaires. Cette qualité de recherche est mise au service d’une pédagogie innovante. Pour en savoir davantage sur un département méconnu des étudiants et qui, pourtant, participe à la reconnaissance de leur diplôme à l’international, nous avons rencontré Tessa Melkonian, Doyenne de la faculté et de la recherche à emlyon.
« Le cœur de notre métier, c’est la transmission du savoir et l’échange »
Bonjour Tessa Melkonian, vous avez intégré le directoire d’emlyon il y a un peu moins d’un an, pouvez-vous vous présenter ainsi que votre parcours ?
Bonjour, j’occupe actuellement le poste de Doyenne de la faculté et de la recherche à emlyon business school. Du fait de mon double attachement pour emlyon et pour le monde de la recherche, j’ai souhaité m’impliquer dans le futur de l’école. C’est ainsi que j’ai candidaté pour la fonction. La Doyenne de la faculté emlyon fait partie directement du Directoire, cela révèle l’importance de la voix du représentant de la faculté dans l’élaboration et la mise en place de la stratégie de l’école. Par ailleurs, je suis moi-même diplômée d’emlyon, promotion 97, et j’y suis enseignante depuis plus de 20 ans, notamment dans le cours Organizational Behaviour. J’ai notamment exercé des fonctions managériales au sein de l’école.
Beaucoup d’étudiants ne savent pas en quoi consiste la faculté emlyon et son organisation, pouvez-vous nous éclairer ?
Ce que l’on appelle faculté emlyon, c’est l’intégralité des professeurs permanents de l’école, c’est-à-dire en CDI. Ils sont aujourd’hui 160 et ont une mission d’enseignement et de création de connaissances.
Cette création de connaissances peut prendre plusieurs formes : la rédaction d’articles académiques ou leur lecture par exemple. Les professeurs ayant un profil de recherche « fort », conduisent des recherches donnant lieu à la parution régulière d’articles dans des revues scientifiques. Les professeurs ayant un profil enseignant « fort » produisent des connaissances sous forme de cas pédagogiques, d’articles de presse ou d’ouvrages ; ils lisent bien entendu les revues scientifiques, se tiennent toujours au courant des avancées scientifiques et actualisent leurs connaissances personnelles pour dispenser des cours les plus complets et à jour possible. Cette double casquette portée par les enseignants permet premièrement, l’actualisation des cours aux vues des avancées scientifiques, et deuxièmement que les professeurs ne dispensent pas leur opinion personnelle mais bien des résultats scientifiques, validés par des experts du monde entier. Cela nous permet de remplir notre rôle en tant que grande école, à savoir apporter des connaissances et des pratiques validées scientifiquement ainsi qu’indiquer les champs qui restent encore à explorer et à valider.
Les étudiants ont des expériences avec les professeurs-chercheurs mais aussi avec les vacataires, qui sont des intervenants venus du monde de l’entreprise. La faculté permanente est aussi présente pour accompagner les professeurs vacataires et leur fournir un socle objectif et scientifique afin de s’assurer de la bonne transmission des connaissances.
Les professeurs sont évalués annuellement sur 3 critères : la pédagogie, via les questionnaires que l’on demande aux étudiants de remplir à la fin du cours ; via la recherche, c’est-à-dire via le classement mondial, l’impact ou le nombre de fois où leurs articles sont cités, et via le service et citoyenneté qui se traduit par la participation à des taskforces, à des réunions, à des groupes de travail et au processus de recrutement. Cette évaluation influe sur la carrière, la rémunération et le niveau du professeur au sein de la faculté.
Où se situe emlyon au sein de la communauté scientifique ?
La faculté emlyon se situe à la troisième place française et est reconnue au niveau européen ; elle est parmi les 20 meilleures institutions. Nous avons la volonté de faire partie du top 15, et de développer notre rayonnement au niveau mondial. emlyon développe aujourd’hui encore sa notoriété et est reconnue au niveau international, notamment à travers les conférences qui sont données dans le monde entier et cela influe positivement sur l’intérêt que portent les enseignants-chercheurs à la faculté d’emlyon afin de l’intégrer.
La majorité des professeurs à emlyon sont internationaux, soit près de 47%, issus de 25 nationalités différentes, et toutes nos communications sont en anglais, ce qui favorise le rayonnement international de l’école.
Les résultats des recherches sont-ils directement appliqués dans les cours ou observe-t-on un certain décalage ?
Le chercheur produit une connaissance qui est très ciblée. Je conduis par exemple des recherches sur la manière dont on calibre et on utilise cognitivement un certain nombre d’informations, ainsi que sur la manière dont on y réagit sur le plan éthique. Cette information est trop précise pour construire tout un cours dessus, mais son apport peut permettre de nuancer les propos d’un cours comme Organizational Behaviour (ndlr : Organizational Behaviour, ou abrégé OB, est un cours obligatoire à emlyon qui traite des comportements humains au sein d’une organisation i.e. les interactions entre individus au sein d’une structure organisationnelle). Lorsque le cours est animé par un vacataire qui n’est pas au fait des dernières découvertes scientifiques, il est du devoir du professeur de mettre des ressources bibliographiques qui abordent le sujet.
Les opinions personnelles des professeurs influent-elles sur le cours dispensé ?
L’intégrité scientifique réclame de prévenir les étudiants de la position personnelle du professeur. Ce n’est pas du tout la même chose de donner son avis en prévenant qu’il s’agit d’un avis personnel que de faire croire que cet avis est une vérité majoritairement acceptée. Nous portons une attention particulière pour que cela n’arrive pas, nous avons notamment un Integrity Officer parmi les professeurs de la faculté qui veille à cela. Cependant, nous faisons face à une grande difficulté, qui s’est révélée et accentuée avec l’épidémie de COVID-19 : les scientifiques ne sont pas toujours en accord les uns avec les autres. Dans ce genre de situation, nous nous devons de soutenir et cultiver la pensée critique des étudiants et leur méthode d’acquisition de connaissances pour leur permettre d’identifier les pistes de recherches solides.
Quelle est la place de la faculté dans la stratégie Confluences 2025 de l’école ?
Le plan « Confluences 2025 » sécurise le recrutement d’une quarantaine de professeurs à l’horizon 2025, soit environ 10 chaque année, ce qui permet à la faculté de développer des pôles d’expertise, comme la responsabilité sociale et environnementale et la transition énergétique ou les impacts de l’IA dans les organisations. Il faut comprendre que certains enseignants-chercheurs sont directement rattachés à ces sujets, mais une part importante des membres de la faculté travaillant sur des problématiques managériales est aussi concernée par ces questions. Par exemple, au sein de l’institut Artificial Intelligence & Data, des travaux sont menés sur des thématiques éthiques et de développement durable.
Le plan a aussi renforcé le rôle et la position de la faculté dans l’élaboration et la mise en œuvre de la stratégie de l’école. Il permet enfin de continuer à développer l’intégrité scientifique, notamment via la mise en place d’un comité d’évaluation externe, constitué de professeurs-chercheurs venus d’autres institutions qui évaluent la production de recherche à emlyon.
En somme, le plan « Cconfluences 2025 » a un impact très positif sur la faculté.
« Nous souhaitons davantage mettre en lumière les travaux réalisés par nos étudiants »
Il a été précisé dans le plan stratégique qu’il y aurait la création de 3 instituts. Quel est leur rôle et quelles sont leurs missions ?
Il s’agit davantage d’une réorganisation interne de la faculté emlyon autour de trois thématiques Artificial Intelligence & Management, Social Innovation et Ethno-Institute, plutôt que d’une création ex-nihilo. Par leur création, nous identifions les sujets qui nous sont significatifs. Cela permet de rassurer les chercheurs d’autres pays en affichant que nous percevons ces domaines de recherches comme des enjeux du monde qui nous entoure et du monde de demain, et sur lesquelles nous investissons. De plus, cette appellation d’institut de recherche est connue au sein du monde de la recherche : l’institut, contrairement au centre de recherche intègre la création de connaissances, la relation partenariale et développe des programmes d’enseignement, c’est-à-dire des cours, des grappes de cours voire des programmes en tant que tels.
Les enseignants RECAPSS se nourrissent-ils des travaux qui ont été réalisés ou prolongent-ils des travaux initiés par des étudiants ?
Un des objectifs d’Ethno-Institute est de mettre en avant le travail des étudiants. Il y a eu par le passé des articles et des livres qui ont été écrits à la suite de RECAPSS, mais nous souhaitons davantage mettre en lumière les travaux réalisés par nos étudiants, car cela rend le lien entre professeurs et étudiants plus fort. De la même façon, nous aimerions que les étudiants sachent ce sur quoi les professeurs travaillent.
« Le management sera sans doute la sociologie du XXIème siècle car il doit et devra répondre aux multiples enjeux que connaissant les organisations et les individus qui les composent »
Quels sont les perspectives et objectifs de développement de la faculté ?
Nous avons un objectif d’excellence académique, par le nombre d’articles et leur qualité. Nous travaillons aussi beaucoup sur l’impact des travaux : auparavant, la chaîne de valeur s’arrêtait à la publication de l’article dans une revue spécialisée ; nous cherchons désormais à diffuser les principaux résultats de la recherche vers des médias grand public. L’enjeu est aussi de faire comprendre à nos professeurs-chercheurs que notre métier évolue vers la diffusion et vers le débat social. Les professeurs de management sont encore peu présents dans le débat social au sens large. Pourtant, le management sera sans doute la sociologie du XXIème siècle car il doit et devra répondre aux multiples enjeux que connaissant les organisations et les individus qui les composent. Aujourd’hui, ce sont encore des économistes, des politologues ou des psychologues qui éclairent le débat public alors que nous avons de grands penseurs du travail à emlyon comme Pierre Yves Gomez, qui est aussi chroniqueur pour le journal Le Monde (voir son dernier ouvrage L’esprit malin du capitalisme paru en 2019 aux éditions Desclée de Brouwer).
La faculté est aidée par une personne du monde de la communication dont l’objectif est de faire le lien entre le monde académique et le débat public, en aidant notamment à reformuler les pensées scientifiques pour les adapter à une écriture plus journalistique. Nous organisons aussi des ateliers et essayons de diversifier nos relations avec les médias français et internationaux pour permettre une meilleure diffusion de nos recherches.
« La faculté est au cœur du réacteur et c’est avec l’ensemble des étudiants et des enseignants-chercheurs que l’on crée l’expérience emlyon »
Quelles sont les sources de financement de la faculté ?
Une des forces de la faculté emlyon est qu’elle finance la recherche en grande partie avec des fonds propres et qu’elle peut donc soutenir un nombre important de chercheurs dans leurs projets. Cependant, nous avons bien conscience que la recherche doit aussi trouver des financements externes pour monter en puissance. Nous développons par exemple des Chaires qui nous permettent de récolter des fonds de partenaires privés et publics, intéressés par les résultats que nous pouvons obtenir.
Avez-vous un mot pour la fin ?
La faculté est au cœur du réacteur et c’est avec l’ensemble des étudiants et des enseignants-chercheurs que l’on crée l’expérience emlyon. L’objectif final de la faculté est de pouvoir mettre nos étudiantes et nos étudiants face aux professeurs les plus compétents possibles. Le cœur de notre métier, c’est la transmission du savoir et l’échange. Les professeurs d’emlyon sont chanceux, car nous avons de très bons étudiants.
Retour sur le parcours de Tessa Melkonian
Diplômée du PGE emlyon business school promotion 1997, après un passage dans le secteur du conseil qui alimente sa réflexion autour des problématiques humaines en entreprise, Tessa Melkonian poursuit sa carrière dans l’enseignement supérieure en tant que professeur-chercheur. Après avoir obtenu son doctorat en philosophie et en étude de comportement organisationnel, elle rejoint emlyon business school en tant que professeur en Management et Comportement organisationnel. En 2013, elle devient responsable du département de management, droit et ressources humaines d’emlyon. En 2020, Tessa Melkonian devient Doyenne de la faculté et de la recherche d’emlyon. Ses recherches en management portent sur l’influence des perceptions de justice organisationnelle et d’exemplarité comportementale sur la coopération des salariés en situation de changement, et sur la performance collective en situations extrêmes. Elle a ainsi publié plusieurs articles dans des revues académiques françaises et internationales dont Academy of Management Journal, Human Resource Management, ou encore Journal of Business Ethics. En 2013, elle reçoit le prix académique de la recherche en management décerné par Syntec Conseil (syndicat professionnel représentatif des sociétés de conseil en France) pour ses travaux sur les réactions des salariés en situation de fusions/acquisitions et, en 2016, le prix de la meilleure recherche francophone décernée par l’AGRH (Association Francophone de Gestion des Ressources Humaines).
Par Colin Faguet et Victor Belloir, rédacteurs chez Verbat’em