Diplômé d’un Executive Master – Manager General et ayant obtenu une certification en marketing digital à emlyon, Emmanuel Kaigre a commencé sa carrière dans les rangs de l’armée de Terre avant de rejoindre le secteur privé. Il est aujourd’hui responsable du développement commercial et marketing chez Nutrilys (spécialiste en compléments alimentaires d’origine marine depuis 1995). Le M est allé à sa rencontre afin de comprendre les réalités de l’exercice de son métier ainsi que les particularités du secteur de l’agroalimentaire et de la supplémentation.
Par Manon Bariteau, rédactrice pour le M
Bonjour Emmanuel, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Bonjour, je m’appelle Emmanuel Kaigre et je suis actuellement directeur commercial pour Nutrilys. C’est pour moi un poste récent puisque j’ai quitté l’Armée de Terre en octobre 2021 où j’étais officier.
Vous êtes diplômé d’un Master (M1) d’ingénierie mathématiques de l’Université d’Angers, et vous avez travaillé près de 17 ans pour l’armée de Terre, pouvez-vous nous expliquer ce choix ?
D’abord, je me destinais à une carrière d’enseignant puisque j’étais professeur de mathématiques. Cependant, j’aspirais à plus de changements, plus de voyages et je cherchais un métier fondé sur le sport et les voyages alors j’ai décidé de m’engager dans l’armée en tant que sous-officier.
J’étais aussi et surtout, intéressé par le management. En tant que sous-officier, je travaillais avec de petites équipes puis, comme j’aspirais à travailler avec de plus grands groupes, j’ai passé le concours interne pour devenir officier (catégorie A).
Avec mon master 1 en ingénierie mathématiques, j’avais la formation suffisante pour accéder à ce poste via le concours interne. J’ai donc pu accéder au corps des officiers de l’armée de Terre pour manager, d’abord en tant que « middle manager », une trentaine de personnes. Pendant 5 ans, j’ai ensuite managé 200 personnes en tant que directeur d’unité.
En octobre 2021, vous avez arrêté de travailler pour l’armée de Terre et vous êtes engagé dans un Master 2, un Executive Master Manager General à emlyon puis avez passé une certification en marketing digital à emlyon, pourquoi avez-vous quitté l’Armée et pourquoi vous êtes-vous engagé dans cette formation à emlyon ?
En 2020, j’ai décidé de quitter l’institution militaire pour un projet familial mais également parce que la deuxième partie de carrière dans l’armée ne correspondait pas à mes aspirations professionnelles.
Le fait d’avoir une formation de manager, formation que propose emlyon me permet de bénéficier d’une grande adaptabilité. Par ailleurs, à titre personnel, je souhaitais compléter mon master 1 que j’avais commencé plus jeune.
D’un point de vue professionnel, je me suis rendu compte d’une chose à l’heure actuelle : certes, un Master 2 ne vous permet pas d’accéder directement à certains postes mais lorsque vous ne l’avez pas, vous ne pouvez pas du tout accéder à ces postes. Les recruteurs sont attentifs aux compétences et à l’expérience, certes, mais cela se fait dans un second temps. Avec le filtrage automatique des CV, si vous n’avez pas les diplômes requis, votre CV est automatiquement mis de côté.
Pourquoi ce parcours à emlyon en particulier ?
Je souhaitais faire une VAE (Validation des Acquis de l’Expérience) parce que ce programme était plus compatible avec mon mode de vie actuel : je suis père de famille, j’ai 3 filles et j’ai des contraintes financières qui m’empêchent de retourner à l’université.
Par ailleurs, je voulais valoriser mon expérience : j’ai occupé des postes à responsabilités pendant mes 17 années passées à l’armée et j’ai managé 9 « middle manager » qui étaient chacun responsables de 15 à 20 personnes.
Que retenez-vous de votre passage à emlyon ?
Je pense qu’il est important d’avoir une culture terrain mais que la formation dont nous bénéficions à emlyon nous rend apte à nous adapter à n’importe quel secteur.
J’ai adoré passer mon certificat en marketing digital avec emlyon, je l’ai trouvé passionnant. Il me permet aujourd’hui d’avoir la légitimité pour faire un audit de Nutrilys (ce qu’elle est, ses qualités, ses défauts, etc) et de proposer des axes pour moderniser l’entreprise. J’ai également reçu une excellente formation en ce qui concerne la gestion d’un budget marketing par exemple, qui est un grand atout pour l’agroalimentaire, secteur dans lequel les gains d’un ciblage pertinent auquel sont adressées des publicités pertinentes sont colossaux.
Je trouve également que les techniques “AGILE” qui sont enseignées actuellement dans les écoles de commerce sont particulièrement pertinentes. L’idée est de donner le maximum de liberté à ses collaborateurs et de ne garder à sa charge que les tâches propres à son poste.
Je trouve qu’avec une école comme emlyon, nous avons la capacité de travailler dans de nombreux métiers, ce qui est une qualité qu’on ne met pas assez en valeur aujourd’hui en France.
Depuis janvier 2022, vous êtes Responsable du développement commercial et marketing chez Nutrilys, pouvez-vous nous présenter l’entreprise ?
Nutrilys est un laboratoire créé il y a 27 ans qui fait du sourcing pour proposer à des clients et des patients les meilleurs produits de compléments alimentaires.
Il s’agit d’une petite structure familiale. Nous maîtrisons toutes les mailles de la chaîne de production (label MSC sur 3 de nos produits) : nous sommes à la fois formulateur et distributeur. Nous respectons également la pêche durable qui est en accord avec l’éthique de l’entreprise et crée de la cohérence dans notre projet.
Nous distribuons principalement nos produits sur Internet, mais aussi dans les magasins bio et dans quelques pharmacies. En ce qui concerne les pharmacies, l’offre est tellement vaste que nous ne la distribuons que dans des pharmacies proches d’un naturopathe ou d’un médecin qui prescrit nos produits.
Nous travaillons également avec les vétérinaires puisque des produits comme Ecomer, Curcumer et Neuromer répondent aux pathologies animales. Nous sponsorisons également un musher (= conducteur de traîneau) qui donne nos produits à ses chiens pour lutter contre le froid.
Quels produits commercialisez-vous et qui sont vos clients ?
Nous commercialisons 6 produits de super nutrition 100% naturels, essentiellement des huiles de foie de poissons (huile de foie de requin, de foie de saumon d’Alaska) mais aussi de la poudre de chaire d’huître qui sont consommés sous forme de gélules.
Ecomer, le premier produit créé par l’entreprise est une huile de foie de requin – on connaît parallèlement l’huile de foie de morue – qui agit comme un fortifiant et augmente la vitalité, surtout en période hivernale. L’huile de foie de requin contient des alkylglycérols, molécules connues pour lutter contre le froid. Elle est aussi utilisée lors de chimiothérapies pour éviter la destruction des globules blancs et donc renforcer l’immunité.
Nous avons deux types de clients.
– D’abord, nos clients utilisent nos produits dans une logique curative. Il s’agit de patients atteints de cancer ou d’une clientèle âgée qui connaît nos produits depuis 25 ans : par exemple, un de nos produits appelé Curcumer à base de rhizome de curcuma aide à lutter contre les rhumatismes.
– Puis nos clients les utilisent dans une logique préventive. Nous soutenons des sportifs de haut niveau, des gens qui font des ultra Ironman, de l’aviron. Il faut rappeler que le but initial de l’entreprise était de créer des barrières préventives pour éviter que les gens ne tombent malades. Nous avons conclu des accords avec les forces spéciales de la police de Los Angeles, avec les Navy SEALs aux Etats-Unis et maintenant nous avons un accord avec une équipe de football américain à côté d’Annecy et de Genève. En effet, nos produits ont des propriétés de récupération (anti fatigue, anti oxydant).
En quoi consiste votre poste concrètement ?
Je m’occupe de la transition, d’apporter des solutions pour l’avenir et de proposer des voies d’amélioration de l’entreprise.
Une des propositions que j’ai faites est de recruter un jeune diplômé sorti d’école qui va préparer pendant un an le renouveau de l’entreprise à travers des solutions technologiques existantes (Marketo, Salesforce, HubSpot, etc). Un autre élément que j’aimerais développer concerne le SEO, SEA, le retargeting et, de manière plus générale, les techniques de marketing.
Quelles sont vos missions ?
En arrivant dans l’entreprise, j’ai d’abord fait un point de situation pour comprendre comment l’entreprise fonctionne, quelles sont ses forces et ses faiblesses et quels sont les risques qu’encourt l’entreprise si certaines choses ne changent pas. J’ai donc trois tâches centrales : comprendre, analyser, auditer.
Pour capitaliser sur ma certification en marketing digital et grâce à mon expérience de management, je souhaite à présent proposer un plan de modernisation de l’entreprise sur plusieurs années.
Quelles sont les particularités des marchés que vous étudiez dans le cadre du développement commercial de Nutrilys ? Quels sont les enjeux ?
Je suis convaincu que dans la vie, quand nous n’avançons pas, nous reculons. Aujourd’hui Nutrilys fonctionne très bien mais le marché se modernise tellement vite que pour ne pas perdre de part de marché, nous devons, nous aussi, suivre cette tendance.
Quelles sont les qualités requises pour occuper votre poste ? Qu’est-ce qu’un bon manager au sein de Nutrilys ?
La qualité première d’un bon manager est d’avoir une vision d’ensemble de son service et de son entreprise. J’ai pu le constater lorsque je travaillais dans l’armée : ce qui fait la différence entre les bons directeurs d’unité (mon poste précédent) et les moins bons, c’est la capacité à connaître l’environnement dans lequel on évolue, c’est-à-dire, comprendre les attentes de ses directeurs et quels sont les besoins de ses collaborateurs directs.
La deuxième qualité nécessaire à un bon manager est sa capacité d’assimilation : si avoir de l’expérience dans un secteur ne me semble pas être un pré-requis obligatoire, un bon manager doit cependant acquérir rapidement des connaissances sur ce secteur pour donner de la crédibilité à son management et ainsi pouvoir déléguer et organiser efficacement.
Je pense que la capacité de contrôle est également nécessaire. La confiance n’exclut pas le contrôle. J’ai confiance en mes collaborateurs, je ne vérifie pas en permanence ce qu’ils font mais régulièrement, je vérifie que ce qu’ils font correspond bien aux attentes de la direction.
Enfin, je pense qu’un bon manager est aussi quelqu’un qui est présent sur le terrain et qui se rend disponible. Pour être disponible, il faut être organisé, avoir un bon emploi du temps. Il ne faut pas oublier qu’un bon manager est là pour faire le lien entre ses collaborateurs et sa direction, c’est-à-dire, rassurer la direction et faciliter le travail de ses collaborateurs.
Comment votre expérience dans l’armée de Terre vous aide-t-elle aujourd’hui dans la réalisation de votre métier ?
Je pense qu’il est important de dire aux étudiants de emlyon que lorsque l’on manage, on est adaptable à n’importe quel corps de métier. Le plus difficile, c’est de le faire comprendre à notre futur employeur qui recherche parfois 10 ans d’expérience dans un domaine précis.
Aujourd’hui, mon parcours dans l’armée de Terre ne me pose aucun problème pour travailler dans le domaine de l’agroalimentaire et en particulier dans la micro nutrition puisque j’ai déjà managé de petits et de grands groupes, des compétences qui me sont aujourd’hui nécessaires dans ce métier. Contrairement à ce que beaucoup pensent, à l’armée, on ne donne pas un ordre et tout le monde obéit : nous n’avons aucun moyen de pression, c’est de la fonction publique, les salaires sont figés, la progression est quasiment figée donc si nous ne faisons pas adhérer les gens à un projet, à des valeurs, nous ne pouvons pas les motiver.
Bien sûr, les naturopathes ou les médecins ont plus de légitimité dans ce domaine du fait de leurs compétences techniques, sur les salons et dans les relations B2B et B2C mais le fait d’avoir une formation de manager nous rend adaptable à n’importe quel corps de métier. C’est une vraie force mais cela peut aussi s’avérer être une faiblesse lorsque nous tombons sur des gens qui ont une vision de l’entreprise à court terme.
Quelles sont les particularités de l’exercice de votre métier dans un secteur particulier, celui des compléments alimentaires ?
Le secteur de l’agroalimentaire est un secteur très intéressant. Dans le cas des produits que l’on propose chez Nutrilys, c’est-à-dire des compléments alimentaires, c’est un peu délicat puisque nous avons des produits aux propriétés remarquables qui nécessitent des études cliniques pour valider tous les bienfaits que l’on met en avant sans pour autant être des médicaments. Nous sommes un peu à mi-chemin entre l’agroalimentaire et le médicament : nous soignons des gens grâce à nos produits sans qu’ils soient reconnus comme des médicaments et nous ne sommes pas soumis à toutes les réglementations auxquelles font face la commercialisation de médicaments. Nous sommes dans le secteur de la supplémentation.
Vous vendez des produits de super alimentation qui enrichissent l’alimentation de base et permettent notamment d’accélérer la cicatrisation. Quelle est alors, votre position sur le transhumanisme, le transhumanisme désignant l’ensemble des techniques qui visent à augmenter le corps humain ?
Je suis complètement contre le fait d’augmenter de manière artificielle les facultés naturelles du corps humain par des stéroïdes, des anabolisants, ou de la drogue. Moi-même instructeur commando, j’ai vu que ceux qui en consommaient étaient épuisés au bout de 3 jours et nous ne pouvions plus compter sur eux.
Respecter ce qui existe dans le milieu naturel est une philosophie de notre entreprise. Nous ne cherchons pas dans la nature quelque chose pour améliorer nos capacités ni à créer quelque chose qui nous augmente.
Nous avons constaté que certains éléments permettaient de supplémenter. Aujourd’hui, l’alimentation que l’on reçoit n’est plus la même qu’il y a 50 ans et n’a plus les mêmes propriétés nutritives. Les produits Nutrilys viennent pallier ce manque. Lorsque vous consommez nos produits, vous n’avez pas le sentiment d’être un surhomme mais lorsque vous arrêtez, vous avez une sensation de fatigue : nous n’augmentons pas les capacités de l’être humain, mais nous complétons l’alimentation pour que l’organisme puisse fonctionner correctement.
Je ne pense pas qu’apporter davantage de nutriments à l’organisme soit du transhumanisme. De manière métaphorique, nous ne venons pas changer les pièces d’une voiture pour lui donner un moteur plus puissant mais nous lui ajoutons de l’huile pour qu’elle fonctionne mieux.
Le mot de la fin ?
Aujourd’hui, nous sommes dans un monde du travail qui est très différent de celui que j’ai connu il y a 20 ans, quand j’ai commencé. C’est d’autant plus particulier pour moi que je bascule du secteur public au secteur privé.
Je trouve qu’il est très important que vous fassiez ce genre d’interviews car rien de mieux que des retours d’expérience pour pouvoir se positionner dans sa vie future : demander les salaires, les vacances, les perspectives d’évolution, etc.