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Briser le plafond de verre

« L’égalité progresse trop lentement, en particulier pour l’accès des femmes aux postes de management les plus importants. Il faut briser ce “plafond de verre.” » affirme Christine Lê, présidente du conseil d’administration de l’Apec (Association pour l’emploi des cadres).

“Plafond de verre” et inégalités salariales sont toujours d’actualité et d’autant plus visibles aux postes à haute responsabilité et chez les cadres.

Par exemple, les femmes ne sont guère plus de 20% à siéger au sein des comités exécutifs et 37% des entreprises comptent toujours moins de deux femmes parmi leurs dix plus hautes rémunérations. Elles gagnent également, en moyenne, 16% de moins que les hommes dans le secteur privé. Néanmoins, elles sont plus nombreuses à sortir diplômées de l’enseignement supérieur : comment alors expliquer la persistance de ce « plafond de verre » ?

On ne peut donner d’explication précise mais plusieurs tendances profondes peuvent émerger face à cette problématique. Le manque de représentation des femmes dans la société occupant de hauts postes peut être une des raisons évoquées. Le dernier rapport du CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel) en date qui traite des représentations femmes-hommes dans les médias audiovisuels pendant l’épidémie de Covid-19, fait état d’une présence des femmes relativement faible au niveau des rôles les plus qualifiés. Seulement 24% des personnalités politiques représentées dans les médias audiovisuels seraient des femmes, 20% en ce qui concerne les experts, etc. Le rapport montre ainsi la tendance à privilégier la parole experte des hommes et souligne le fait qu’à l’écran, le pouvoir est plus souvent incarné au masculin.  Ce manque de représentation féminine sur ces sujets n’enjoint pas les femmes à fissurer le plafond de verre qui les empêche d’accéder à des postes à haute responsabilité. Il est donc urgent d’inverser cette tendance : les médias doivent prendre part à cette émancipation en donnant la parole à davantage de femmes expertes, politiciennes, docteures, chercheuses etc.

L’implicite relégation des femmes à la sphère du privé peut aussi expliquer le faible effectif de femmes occupant de hauts postes. Se consacrer pleinement à son travail tout en étant mère, est toujours perçu par la société comme contradictoire ou alors extrêmement complexe à réaliser.  « Si les femmes sont implicitement associées à la sphère privée et à la position dominée, les femmes dirigeantes font face à un double handicap : soit elles se conforment à l’idéal traditionnel féminin, auquel cas elles ne peuvent pas être perçues comme des leaders compétents ; soit elles se conforment à l’idéal du leader, auquel cas elles sont pénalisées pour ne pas correspondre à l’idéal traditionnel de la femme » expliquait l’économiste Esther Duflo en 2006. Cet équilibre exigé entre idéal traditionnel féminin et place de leader peut être perçu comme extrêmement difficile à tenir pour une majorité de femmes, d’où le fait qu’elles se détournent de positions dominantes. De plus, les inégalités salariales bondissent une fois qu’une femme devient mère : en EQTP (Salaire en équivalent temps plein) le salaire net moyen d’une femme avec trois enfants ou plus est 31 % inférieur à celui d’un homme avec autant d’enfants, contre 7 % pour une femme sans enfant. Ces éléments regroupés peuvent fortement influencer le choix de carrière d’une femme et la dissuader de prétendre à de postes à haute responsabilité.

Si l’on veut définitivement briser ce plafond de verre, il est nécessaire de repenser entièrement les dispositifs d’articulation des temps de vie professionnelle et de vie personnelle des femmes en les accompagnant d’autant plus dans les situations de grossesse et de parentalité. Cela pourrait mettre fin à ce phénomène d’autocensure qu’elles peuvent parfois ressentir lorsqu’elles ont de hautes ambitions professionnelles.

Il est essentiel, pour notre société ainsi que pour les générations futures, qu’il y ait des femmes à tous les niveaux. C’est un enjeu de diversité et d’égalité mais aussi d’exemplarité.

 Par Emma Pajot, membre du Collectif Olympe