Depuis plusieurs jours, de vives tensions ont opposé les Palestiniens et les Israéliens en provoquant des dizaines de décès et des centaines de blessés.
Quid de l’objet du conflit ?
Les derniers événements survenus à Jérusalem-Est reposent sur un conflit judiciaire soulevé en 1970.
A ce jour, le conflit opposant les Israéliens et les Palestiniens concerne en réalité la propriété des maisons situées dans la partie Est de Jérusalem et plus particulièrement le quartier dit Sheikh Jarrah.
Quid des faits ?
Depuis 1950, plusieurs familles palestiniennes occupent des biens (maisons) situés dans le quartier de Sheikh Jarrah. Ces propriétés ayant été financées par les Nations Unies et la Jordanie dans le cadre d’une assistance matérielle apportée aux réfugiés palestiniens dans le Proche-Orient.
Dans cette démarche, le Ammann était compétent pour délivrer les actes de propriété aux familles palestiniennes lors de leur installation. Chose qui n’a jamais eu lieu pour des raisons, à ce jour, non évoquées. Ainsi, les Israéliens contestent la légitimité des Palestiniens à occuper de telles propriétés en l’absence d’actes de propriété.
En 1970, une action en justice à été ouverte et porte sur une vingtaine de maisons situées à Jérusalem-Est. En date du jeudi 06 mai 2021, les familles palestiniennes ont été expulsées sous ordre des autorités israéliennes.
La Cour suprême israélienne devait se prononcer le 10 mai 2021 pour statuer sur l’affaire. Toutefois, la juridiction a annoncé un ajournement d’audience d’une durée d’un mois pour manque d’éléments permettant de statuer définitivement sur la question litigieuse.
Quid de la loi israélienne ?
En vertu de la loi israélienne relative aux questions juridiques et administratives de 1970, il est possible pour des personnes israéliennes et juives de prouver que leur famille était présente à Jérusalem-Est avant la guerre israélo-arabe, soit avant 1948. Si tel est le cas, il serait ainsi possible aux Israéliens juifs, sur le fondement de cette loi, de demander la restitution de leur droit de propriété.
Par ailleurs, la loi israélienne de 1950 dite “loi des absents” interdit formellement aux personnes de nationalité palestinienne de récupérer leurs propriétés abandonnées ou perdues lors de la guerre de 1948.
Quid de la loi palestinienne ?
La législation palestinienne ne prévoit pas la même solution pour les biens perdus pendant la guerre. Ainsi, le juge palestinien n’est pas compétent à trancher le litige.
Quid du Droit international humanitaire ?
De surcroît aux traités et accords internationaux portant sur le droit international humanitaire, il existe des entités chargées de veiller au respect du droit humanitaire. Dans le contexte du conflit israélo-palestinien, on retrouve le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH). Cette entité importante contribue à la promotion et au respect des droits de l’homme. Par conséquent, elle est chargée des « violations des droits de l’homme les plus importantes, tant soudaines que chroniques, en particulier celles qui représentent un danger imminent pour la vie de la population ».
Le porte-parole du HCDH, M. Colville a déclaré que « La loi sur la propriété des absents et la loi sur les questions juridiques et administratives sont appliquées de manière intrinsèquement discriminatoire, uniquement sur la base de la nationalité ou de l’origine du propriétaire ».
Le Comité des Nations Unies pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien a publié quant à lui un communiqué requierant la «cessation de toutes les politiques et pratiques israéliennes illégales, y compris toutes les activités de colonisation, les démolitions de maisons, les expulsions et tout autre acte de punition collective contre la population civile palestinienne ».
Possible qualification des faits en apartheid ?
Selon la convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid (1973) et du statut de Rome de la Cour pénale internationale en vigueur depuis 1998, l’apartheid est qualifié de crime contre l’humanité.
Afin d’être qualifié en tant que tel, trois conditions sont requises :
- Une intention de maintenir la domination d’un groupe racial sur un autre,
- Un contexte d’oppression systématique du groupe dominant sur le groupe marginalisé,
- Des actes jugés “inhumains”.
Dans le contexte du conflit israélo-palestinien, l’État d’Israël ne fait pas partie du Statut de Rome. Néanmoins, par une décision en date du 22 mai 2018 (ICC-01/18-1) la Cour pénale internationale s’est déclarée compétente territorialement, pour apprécier les crimes qui seraient commis par Israël en Palestine. Par conséquent, une enquête a été ouverte et portera sur les crimes qui auraient été commis dans le cadre du présent conflit et ceux, depuis le 13 Juin 2014.
Par Sarra Bouazzi, membre chez Quid Juris et Responsable-adjoint de la Clinique juridique
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