Gilles : Est-ce que tu peux nous présenter le Petit Paumé, en quelques mots ?
Arthur : Dans les grandes lignes, le Petit Paumé est une institution lyonnaise de 53 ans qui s’efforce de mettre en lumière les spécialités de la culture et de la gastronomie de Lyon. Nous cherchons aussi à partager les bons plans dont la ville regorge.
Le Petit Paumé fonctionne comme une entreprise avec ses différents supports médias: un site Internet, une application, différents réseaux sociaux (Instagram, Facebook, YouTube, LinkedIn…), et le guide, notre média historique le plus connu, distribué chaque année à plus de 200 000 exemplaires. À côté de tous ces médias, nous avons une régie publicitaire qui a pour vocation de vendre des stratégies de communication à nos prospects.Voilà notre business model.
Dans l’objectif d’animer le quotidien des lyonnais, nous disposons aussi d’autres canaux tels que notre pôle événement, qui tend aussi à devenir une régie événementielle. Celui-ci organise par exemple en temps normal :
- Les Lancements : grands événements de distribution de nos Guides à Bellecour, Villeurbanne ou encore Croix-Rousse, qui rassemblent plusieurs milliers de personnes.
- Le Village du PP, généralement au début du mois de juin, qui n’a malheureusement pas eu lieu l’an dernier : événement en plein air dans un lieu privatisé, rassemblant des étudiants autour de pintes de bière à 3€ et d’une bonne musique.
- Les petites pauses : événements plus récurrents réunissant environ 300 personnes dans des lieux sympathiques et décalés autour d’un thème.
Compte tenu de la situation sanitaire, nous avons repensé notre stratégie événementielle au profit d’évènements solidaires à Lyon et destinés aux citoyens et aux établissements lyonnais actuellement en souffrance.
G : Concernant maintenant le fonctionnement du Petit Paumé, comment définissez-vous les endroits à aller tester ? Les tenants de ces lieux sont-ils au courant que vous allez les tester ?
A : Il existe deux types de
tests : les tests gratuits sur invitation et les tests payants.
Pour les tests sur invitation, nous envoyons un mail au nom du Petit Paumé en demandant à un responsable s’il est d’accord pour que nous venions tester son établissement. Auquel cas nous lui demandons alors de nous envoyer une invitation. Le test est donc gratuit, mais nous n’annonçons pas qui viendra ni quand cette personne viendra.
Concernant les autres tests, nous tenons un listing de tous les établissements de Lyon à tester. Une fois sur place, tous les tests (entrée, plat, dessert) sont effectués de façon anonyme. À la fin arrive ce qu’on nomme « le dévoilement » : quand nous avons payé l’addition, nous annonçons au serveur que nous sommes du Petit Paumé. Cela nous permet de prendre un peu de temps pour échanger quelques mots avec lui, le chef et le gérant s’il est sur place. Nous accordons une grande importance au lien avec les établissements et les Lyonnais.
G : Quelles sont les spécificités de ton mandat par rapport aux précédents ? Où est-ce que vous souhaitez innover ?
Nous avons prévu pour notre mandant trois innovations majeures :
D’abord, repenser le guide. Nous y sommes contraints par la fermeture des bars et des restaurants. Il faudra donc être créatif.
Ensuite, nous devrons proposer une transition digitale novatrice. Il s’agira alors de créer un nouveau site internet et une application aux technologies modernes et innovantes.
Enfin, nous souhaitons créer un pôle audiovisuel pour développer nos idées de nouveaux formats vidéos.
G : Avez-vous déjà réfléchi à des adaptations éventuelles par rapport à la situation sanitaire ?
A : Oui, complètement ! Nous y travaillons déjà depuis 3 mois avec les membres du Bureau. Nous nous sommes même confinés ensemble pour y réfléchir.
Nous avons construit le processus d’adaptation suivant : pour faire simple, nous avons créé un indice, qui se base sur plusieurs indicateurs clés vraiment très différents comme les arrêtés préfectoraux, le chiffre d’affaire déjà réalisé par le PP, ou encore le mental du mandat. En parallèle, nous avons aussi fixé des « checkpoints » toutes les 2-3 semaines, au cours desquels nous analysons chaque indicateur pour mieux s’adapter.
Si la situation est vraiment très mauvaise, nous changeons complètement en réorganisant le mandat. Par exemple, si les testeurs ne peuvent plus tester, nous les faisons aller au Pôle de « rédaction d’articles », comme l’ont fait les Ovnis (ndlr Mandat Petit Paumé 2020) l’année dernière – ce qui explique le nombre important d’articles publiés sur Facebook.
Notre travail est de toujours réfléchir à un plan B, à un plan C voire à un plan D. Donc quelque part nous démultiplions le travail du PP puisque nous réfléchissons à de nombreux projets différents. C’est un travail exigeant mais très stimulant !
G : Dans ce contexte sanitaire compliqué, avez-vous prévu de compenser l’absence d’événements à organiser par le développement de vos nombreux canaux de communication ?
A : Oui, totalement ! Nos médias sont segmentés entre le format papier et le format digital. Si nous ne pouvons pas utiliser le format papier, comme lorsque nous lançons nos guides place Bellecour, toutes nos ressources vont être allouées au développement optimal de nos contenus digitaux.
Parmi les changements au PP cette année, nous avons créé un Pôle audiovisuel, qui manquait jusqu’ici, notamment pour alimenter les réseaux avec du nouveau contenu. En particulier, nos formats Brut ou Konbini cartonnent parce qu’ils témoignent de notre envie de montrer des acteurs lyonnais et de donner un visage aux réseaux du PP, qui restent pour l’instant assez impersonnels. Nous sommes notamment allés interviewer des restaurants en grande difficulté et nous avons valorisé toutes les initiatives de restaurants qui ont su s’adapter à la crise sanitaire. ) -> du coup ça se répète un peu avec les modifs que j’ai fait plus haut, on peut peut-être skip cette partie si ça te va aussi ?
G : Comment votre mandat a-t-il choisi son Bureau ?
A : J’ai une critique par rapport au fonctionnement des constitutions de Bureaux dans les campagnes. Lorsque des étudiants listent, il arrive un moment où la Corpo (ndlr Corporation Étudiante) va leur demander de désigner un Bureau. Au sein de chaque liste, des étudiants se portent candidats pour les postes auxquels ils souhaitent accéder.
Le problème est que ceux qui se présentent à ce moment-là des campagnes, pour devenir en l’occurrence Président de Petit Paumé, ou Secrétaire Général du Ski Club par exemple, n’ont aucune idée de ce que représente le poste pour lequel ils sont volontaires. Ils n’ont aucune information à ce sujet. Il m’a fallu 2 mois de passation pour bien comprendre en quoi consisterait mon rôle de Président du PP…
En ce qui nous concerne, les listeux qui se sont montrés les plus investis pendant les campagnes se sont présentés aux élections du Bureau. Ce sont ceux qui répondaient aux appels du QG Créa à 3h du matin pour aller finir une boîte en carton, ceux qui étaient là aussi pour remotiver l’équipe lorsqu’il y avait des coups de mou voire des personnes qui souhaitaient arrêter.
Au fil des campagnes, certains s’attirent la sympathie et la confiance de toute leur liste, et c’est ce qui justifie plus tard leur élection au Bureau. Même si évidemment ils ont une certaine légitimité, il est impossible de juger leurs compétences dans leur future tâche car il est trop tôt, ce que je trouve vraiment dommage.
G : Qu’est-ce qui t’a motivé à lister au départ ? Et plus spécifiquement Petit Paumé ?
A : Cela peut paraître surprenant, mais je n’avais pas forcément envie de lister PP à l’origine. J’étais même assez motivé pour lister Ski Club. Mais je ne connaissais vraiment personne à l’école, et il se trouve que j’ai plus apprécié l’ambiance des listes PP après avoir rencontré plusieurs personnes.
Avant tout, j’ai voulu lister pour me lancer à fond dans un projet et rencontrer des personnes, mais aussi apprendre humainement et développer quelques « hard skills ».
C’était pour moi une bonne façon d’utiliser les temps libres laissés par notre emploi du temps. Je voyais ça comme une grande aventure et de ce point de vue là je n’ai vraiment pas été déçu.
Les campagnes m’ont appris énormément de choses. En tant que Responsable Démarchage, j’ai dû gérer plusieurs fichiers Excel, du cold phoning et d’autres choses assez pénibles, alors que je travaillais en même temps à la communication pour réaliser les vidéos de campagne.
Mais tout cela a été très formateur. J’ai ainsi pu développer un certain nombre de compétences sur la réalisation ou le graphisme d’une part, et d’autre part en terme de management, en organisant des réunions, même si c’était avec des amis.
C’est un ensemble de soft skills et de hard skills qui reste très intéressant.
G : Avec le recul, comment s’est passée ta campagne ?
A : En pleine campagne, je ne vous aurais pas du tout dit la même chose qu’aujourd’hui ! Je trouve que les campagnes sont géniales et qu’elles poussent à se surpasser. Nous avions toujours l’impression d’être complètement nuls, d’être sur la sellette et d’être éjectables à tout moment, mais nous avons appris par la suite que ça n’avait jamais été le cas. Le côté positif est que cela nous a encouragé à toujours nous améliorer.
Les campagnes ont été une expérience incroyable par leur intensité. Il y avait des moments plus difficiles que d’autres. Les coachs étaient très exigeants et nous avions peur d’être éliminés par manque d’implication. En effet, certains membres participaient très peu voire pas du tout aux missions. Mais il faut se faire une raison, d’autant que des ghosts il y en a dans toutes les listes.
Mais face à ces épreuves il y a tous les moments géniaux qui forment des souvenirs inoubliables. : les Joker Days ou encore la Hotline, qui fait, elle, partie de mes moments préférés parce que nous rencontrons les 2A, après avoir vécu une période où nous ne voyions quasiment que les membres de notre liste et les coachs. Les 2A étaient très gentils, très accueillants et c’était incroyable de faire des soirées avec eux.
Il y a aussi la CRA qui est réellement l’apothéose. Cela a été fantastique d’organiser un tel événement, en préparant à boire et à manger dans un château pour plus de 800 personnes. Mon meilleur souvenir des campagnes reste sûrement ce dîner qui était en tout point mémorable.
G : Quelles sont pour toi les qualités d’un bon listeux PP ? À ton avis, quelles sont les qualités de votre liste qui ont fait la différence avec vos concurrents ?
A : C’est peut-être un peu bateau, mais il est difficile de définir un bon listeux. Il est plus simple de qualifier ce qu’est une bonne liste. Même si je répondais « voilà ce à quoi doit ressembler le listeux parfait : » une liste de 35 profils du genre ne serait pas garantie de fonctionner.
Pour avoir une bonne liste, il faut des personnes avec des profils très différents : des leaders, des gens qui motivent, d’autres qui ont des compétences ciblées comme en montage. Je pense qu’il faut aussi des râleurs, des fainéants, des rigolos, des créatifs. Il faut de tout !
Ensuite, pour être un bon listeux PP, deux qualités très importantes sont nécessaires : l’humilité et le respect.. La campagne PP requiert d’être très créatif et original, mais il faut aussi savoir rester humble et respectueux. Respectueux envers les coachs et les 2A, mais aussi et surtout vis-à-vis de ses amis listeux. Le plus dur est de voir certains abandonner alors que tout le monde s’est engagé dans l’aventure, ce qui alourdit la charge de travail des listeux restants.
Dans la mesure où les campagnes PP sont très exigeantes en matière d’organisation d’événements, comme le dîner prestige à la CRA où il faut savoir préparer des plats gastronomiques pour 800 personnes, avec par exemple des centaines de bouteilles de vins démarchées, il est impossible de tenir en n’étant moins de 35. Typiquement, nous étions, une bonne « armée » de 55 à la CRA.
Une troisième qualité, qui doit être commune à tous les listeux, est d’être engagée à fond et jusqu’au bout, notamment parce que l’expérience des campagnes n’a de sens que si elle est menée jusqu’au bout en ayant le sentiment d’avoir tout donné.
G : As-tu des conseils à donner aux listeux pour les campagnes à venir ?
A : Après avoir regardé certains devoirs de liste, je voudrais souligner qu’il est très important de bien se rappeler qu’au cours des campagnes, l’objectif est de se faire remarquer (dans le bon sens du terme, évidemment), et d’être créatif, intelligent et drôle.
Le conseil que les coachs nous ont très vite fait passer est de ne rien acheter qui soit neuf ou déjà tout fait. Le but de ces campagnes est vraiment de vous faire utiliser des bouts de carton de mauvaise qualité, trouvés dans la rue ou récupérés en déchetterie, pour les mettre en valeur uniquement grâce à votre créativité. Personne n’attend des choses neuves ou chères, les seules choses qui comptent sont la débrouillardise, la créativité, l’originalité, mais aussi le fun.
Par exemple, pendant les campagnes l’année dernière, le post le plus liké, tous groupes de présélections confondus, était celui d’une liste Ski Club qui avait fait gagner 2 falafels livrés à la maison par des listeux déguisés. Cela ne leur avait presque rien coûté et ce n’était objectivement pas exceptionnel mais l’idée était amusante et prouvait qu’ils étaient déterminés. Des gros lots comme des télévisions suscitaient moins d’engouement, même s’ils avaient plus de valeur, car ils n’étaient pas spécialement amusants.
L’esprit des campagnes est vraiment de partir de rien pour réussir à faire quelque chose de drôle.
G : Veux-tu apporter le mot de la fin ?
A : Nous avons souvent l’impression que le Petit Paumé est une association à part de l’école, et que nous ne la voyons jamais. Il est vrai qu’à la différence des autres associations, la finalité du PP n’est pas destinée à emlyon. Nous sommes là pour Lyon, et presque tous nos événements ont vocation à se dérouler en dehors des murs de l’école.
Mais nous avons des locaux au sein du campus, qui se situent à droite du Learning Hub et dont la porte est toujours ouverte. Nous sommes ravis de pouvoir discuter avec les listeux et nous organisons des permanences au local, donc, si jamais vous avez des questions sur notre association, sur le fait d’être listeux ou sur quoi que ce soit d’autre, n’hésitez pas à venir nous voir !
Ensuite, il y a quelques événements organisés dans le cadre d’emlyon, comme les grands Happy Hours avant nos lancements (ndlr : avant chaque publication du guide, le PP organise une avant-première du lancement du guide, réservée spécifiquement aux étudiants de l’école). Ce sont d’ailleurs ces événements qui m’ont convaincu de passer du Ski Club au PP !
Les 2A doivent sans doute se souvenir du HH de lancement du mandat Minos en septembre. Ils avaient distribué des exemplaires de leur guide et organisé le HH quelques jours avant le lancement officiel à Bellecour. Il y avait des dizaines de stands de restaurateurs sur le Roofpop qui offraient monts et merveilles, notamment des pintes à seulement 1,50€.
Par Gilles Kalfa, journaliste chez Verbat’em