La Chute de Satan
“Better to reign in Hell than serve in heaven”
John Milton, Paradise Lost
Au Panthéon céleste, un ange de Lumière,
Le préféré de Dieu et de tous le plus beau,
Répondait à ce nom glorieux de Lucifer ;
Et de la Vérité il portait le flambeau.
Au Panthéon céleste, abaissés jusqu’à terre,
Anges et chérubins s’inclinaient devant lui.
Et leur chœur mélodieux chantant le bréviaire
S’accordaient à sa voix, suave dans la nuit.
Au Panthéon céleste, il n’avait point de pair ;
Et tout être créé vers lui levait les yeux,
Et il les regardait chacun comme des frères,
Et il aimait le monde. Et il était heureux.
Au Panthéon céleste, un jour – divin mystère ! –
Un jour Dieu vint le voir car Il avait un plan :
Par Son Verbe en six jours créer le ciel et la terre.
« Fiat lux ! » et sortit un monde du néant.
Au Panthéon céleste, aux cieux s’illuminèrent,
Scintillantes beautés au firmament du ciel,
Des astres, un millier d’étoiles, luminaires
Qui déjà s’agitaient dans leurs courses plurielles.
Au Panthéon céleste, alors cinq jours passèrent
Où l’ange méditait – « Fiat lux » – la puissance
De deux mots. Quand soudain Dieu fit une chimère :
Au sixième jour, l’homme à Sa ressemblance.
Au Panthéon céleste, une moue altière
Vint ternir la beauté de l’archange devant
– En était-il jaloux ? – l’être de poussière :
« Je n’ai, dit-il à Dieu, nul besoin de servant. »
Au Panthéon céleste, à l’aurore première
Du septième jour, il vit dans le reflet
De l’Euphrate troublé des traits qui le grisèrent,
Et Narcisse fait ange eût dit : « Cela me plait ! »
Au Panthéon céleste, Eden était désert
Car Dieu se reposait. L’homme était seul ; et l’ange
Ne pouvait se résoudre à le servir – Misère ! –
Or Dieu était absent, il fallait qu’il se venge…
Au Panthéon céleste, il prépara la guerre
Et pour l’originel péché ce plan tordu :
La pomme défendue, la langue de vipère
Suffiront à damner l’humanité perdue.
Au Panthéon céleste, un archange trop fier,
Désirant être Dieu au mépris de son âme,
Fit le choix du Néant pour régner en enfer,
Dans sa chute cria deux mots : « Non serviam ! »
Ô toi, homme damné, écoute en ta colère
Le cri de ton orgueil, ce sombre qui funeste
Qui sorti du démon, ton ange de lumière,
Et qui résonne encore au Panthéon céleste !
À R. Clayton – mon semblable, mon frère
Erwan Smith