Force est de constater que de nombreux emplois ont disparu, ou ont vocation à disparaître, du fait de la pandémie. Comment assurer la gestion des talents dans un contexte aussi peu favorable que celui des mutations actuelles du marché du travail ? Il s’agit là d’un des enjeux majeurs pour les Ressources Humaines : assurer la protection des salariés, lutter contre les risques psycho-sociaux (RPS), tout en maintenant l’ensemble des emplois effectifs et assurer un recrutement pourtant nécessaire. Un nouvel outil était donc indispensable. Le gouvernement et les partenaires sociaux se sont accordés sur un dispositif novateur : la transition collective. L’objectif est d’accompagner au mieux les salariés concernés par la potentielle disparition de leur emploi vers une reconversion professionnelle. Pour cela, ils ont eu accès dès le 15 janvier 2021 à une formation, délivrant une certification, ou une validation des acquis dans un domaine qui leur assurera une embauche sans période de chômage et avec le maintien d’une rémunération pour la durée de la reconversion.
Comment un tel système peut-il être mis en place ?
Dans un premier temps, il convient de négocier un accord type GEPP, Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels. L’objectif des RH, et plus particulièrement au sein des Relations Sociales, est de cibler les emplois fortement impactés par la pandémie au sein de l’entreprise. Un dialogue social sera alors ouvert, avec le concours d’opérateurs de compétences (OPCO) si l’entreprise le souhaite. Une fois conclu, l’accord sera déposé en ligne auprès de la Direccte, Direction Régionale des Entreprise, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi. A noter que celle-ci met à disposition des listes de métiers permettant de cibler au mieux ceux porteurs dans les territoires. Dans un second temps, l’entreprise devra alors monter le dossier de demande de prise en charge pour les salariés concernés par la transition collective. L’Association Transitions Pro prendra ensuite le relais et se chargera de l’instruction et de la validation du dossier.
Quant à la prise en charge, l’Etat assure un financement intégral pour les entreprises de moins de 300 salariés, puis 75% pour les entreprises comptant jusqu’à 1000 salariés. Au-delà, un financement de 40% sera effectué. L’investissement représente 500 millions d’euros ajoutés aux 900 millions d’euros déjà mis en place dans le plan France Relance pour la reconversion des salariés. A noter que les congés de reclassement pourront durer jusqu’à 24 mois à partir du 1er janvier 2021. En effet, la loi de financement de la Sécurité sociale 2021 prévoit dans ce cas précis un alignement des rémunérations sur l’indemnité d’activité partielle.
Quid des salariés ?
Les personnes désireuses de bénéficier de la transition collective seront aidées par un conseiller en évolution professionnelle. Son rôle sera de créer un parcours de reconversion cohérent avec le territoire dans lequel il s’inscrit. Une fois la formation terminée, le salarié aura alors le choix de réintégrer son poste au sein de son entreprise ou choisir de pratiquer le métier relatif à sa reconversion. A noter qu’il devra toutefois tenir compte des modalités de rupture du contrat de travail toujours existant lors de la formation.
Si le maintien du salaire est assuré pendant la formation, rien n’est précisé quant au niveau de la nouvelle rémunération. Aussi, la transition collective n’aurait-elle pas pour conséquence indirecte d’évincer les personnes en recherche d’emplois ainsi que les jeunes diplômés ?
D’aucuns diront qu’un tel système pourrait paradoxalement favoriser le chômage. Car si la demande du salarié est une fonction croissante du salaire réel, alors l’appel à candidature côté employeur est une fonction décroissante dudit salaire réel. Dès lors, le point d’équilibre entre ces deux variables serait illustré par un salaire effectif réel. Considérant les interrogations visées précédemment, il serait légitime de s’interroger sur le possible dysfonctionnement du marché causé par ce nouveau dispositif.
Pour autant, la transition collective est bel et bien un outil rudement efficace pour les Ressources Humaines en matière de gestion des talents. Dysfonctionnement du marché ou insuffisance de la demande ? Théorie néo-classique ou prisme keynésien ? Qu’importe. Car l’heure n’est plus à la théorie mais bien à la transition collective.
Par Maëlys Rodriguez, Quid Juris