En pleine crise sanitaire, le secteur de la gastronomie et de la restauration continue d’en faire rêver plus d’un, et pour cause : la pandémie a permis à beaucoup de se rendre compte de l’importance de la bonne chère, synonyme de plaisir et de réconfort. Comment se lancer dans ce secteur en pleine mutation en étant étudiant en école de commerce ? Pour le M, Julien Doan, jeune diplômé d’emlyon business school, raconte comment il a réussi à co-fonder avec Aissata Fane, son associée, « Savane et Mousson », un traiteur et restaurant de cuisine fusion Afrique-Asie, dont le premier restaurant ouvre à Paris en ce début d’année.
Par Jilali Hakam,
Peux-tu te présenter, et présenter brièvement ton parcours ?
Salut, j’ai 26 ans, je viens de banlieue parisienne, du Blanc-Mesnil en Seine-Saint-Denis. J’y ai suivi une prépa ECS et j’ai “cubé” ma deuxième année avant d’intégrer emlyon. En fin de première année à emlyon, j’ai postulé au double-diplôme avec l’Ecole Centrale de Lyon, avec succès. J’ai rencontré Aissata lors de ma première année et nous nous sommes très vite bien entendus. On a eu l’idée de monter un business ensemble dès la fin de la première année, mais le double-diplôme avec Centrale a retardé les choses.
Vous avez donc lancé Savane et Mousson pendant vos études respectives à emlyon et Centrale Lyon ?
Oui, nous avons lancé le projet en avril 2019, durant notre troisième année. En avril, plus précisément. Je finissais les cours à Centrale en juillet, et les reprenais à emlyon à la rentrée scolaire. Du fait du double-diplôme, je n’avais pas beaucoup d’expérience professionnelle (pas de stage de fin de 1ère année, ni en 2ème). Heureusement, Aissata était à la Junior Entreprise, et avait déjà fait deux stages au moment du lancement : c’est elle qui a aidé à « poser le cadre » en quelque sorte.
Comment as-tu réussi à concilier la création de votre entreprise avec tes études à emlyon, en double-diplôme d’ingénieur qui plus est ?
C’était vraiment difficile. Nous avions beaucoup de contrats à conclure à Paris – merci TGV Max ! Nous vivions des semaines infernales où nous devions souvent prendre le train à 6h du matin pour honorer une prestation puis revenir à Lyon pour aller en cours le lendemain. L’essentiel, c’est de se dire que ce n’est qu’une situation temporaire : nous avons pu rater des cours, parfois, mais ce n’était pas amené à durer. La chance que nous avions était de former un binôme : lorsque l’un de nous devait s’astreindre à des obligations scolaires, l’autre prenait le relais pour honorer la gestion de la société.
Quel est le cours d’emlyon qui t’as le plus aidé dans la création de ton projet ?
Au cours de ma scolarité à emlyon, j’ai suivi le parcours entrepreneurs. C’est un parcours sélectif qui permet de rencontrer de multiples entrepreneurs à succès qui nous prodiguent leurs retours d’expériences, très utiles lorsqu’ il s’agit de se lancer.
Avez-vous une affinité particulière avec la cuisine ? Comment avez-vous eu l’idée de lancer un tel projet, qui est assez original pour des étudiants d’école de commerce ?
C’est un projet qui nous tenait vraiment à cœur. Nous adorons tous les deux goûter et expérimenter de nouvelles saveurs. Aissata a fait son stage de pré-master en Asie, et j’ai eu la chance de me rendre en Afrique pour réaliser un projet lors de mes études à emlyon. De retour de nos déplacements respectifs, nous avons remarqué que l’aliment de base dans ces deux parties du monde était souvent le riz. C’est cette similitude qui a forgé le concept : une cuisine fusion Afrique-Asie, avec le riz comme trait d’union !
Au début du projet, nous aimions davantage manger que cuisiner, il faut l’avouer… Mais nous avons appris sur le tas en essayant nos recettes pour lancer un traiteur. Au début, nous faisions tout nous-même en cuisine : rien n’est gravé dans le marbre, on peut toujours apprendre quand on veut ! Ouvrir un restaurant, c’était un rêve d’enfant, et je tenais vraiment à le réaliser le plus tôt possible, et pas plus tard, pas sous forme de reconversion professionnelle.
Vous avez fait un choix original en commençant par un traiteur et non un restaurant : comment l’expliquez-vous ?
C’était avant tout un choix stratégique. Nous nous sommes dit : « on est à emlyon, une très bonne école, beaucoup de nos camarades de promotion vont finir dans de grosses boîtes, ça nous fera des contacts pour s’implanter en tant que traiteur. ». Aussi, une activité de traiteur est beaucoup plus facilement gérable pour deux jeunes, toujours étudiants. C’est plus flexible : comme tout est fait à la prestation, les coûts fixes sont moindres, ce qui ne demandait pas des fonds énormes pour se lancer et faire tourner la machine. Cependant, nous avions dès le départ l’idée de lancer notre restaurant à terme. Entre ces deux étapes, nous avons inauguré un food truck stationné sur le parvis de la Bibliothèque François Mitterrand, que nous déplaçions également à l’occasion de festivals.
Comment fonctionnez-vous en tant que duo ?
Chacun de nous a son secteur de prédilection, même si, selon les besoins, nous pouvons tout à fait nous occuper de tout chacun de notre côté. Aissata s’occupe davantage du côté RH, du recrutement, des relations clients et de la partie traiteur. De mon côté, je m’occupe davantage des finances, de la trésorerie, de la stratégie d’entreprise, et aussi de tout ce qui concerne la création graphique et le design – c’est-à-dire la charte graphique. Nous employons 5 personnes pour nous aider dans la gestion quotidienne de l’entreprise.
As-tu un dernier mot, un conseil à donner aux étudiants qui ont pour projet de lancer leur propre restaurant ?
Rien n’est gravé dans le marbre. Je n’avais aucune formation en cuisine, rien, et ça ne m’a pas empêché de me lancer dans ce projet. Il ne faut pas être bloqué par ce genre de considérations, ou se dire que l’on « n’est pas fait pour ça », parce que l’on peut quasiment tout acquérir à force de travail et de volonté.