Par Hicham Ghermani
Si vous avez adoré détester Gollum, craindre King Kong ou admirer César, personnage incontournable du remake de la Planète des Singes, c’est grâce à Andy Serkis, star incontestée de la performance capture, qui a su marquer l’histoire du cinéma grâce à ses performances.
La performance capture est une technique qui consiste à filmer une personne afin de la recréer en images de synthèse.
Nous avons tous, d’une manière ou d’une autre, expérimenté la motion capture, que ce soit par le prisme du cinéma (Ted, Avatar, Le Seigneur des Anneaux…), du jeu vidéo (Kevin Spacey dans Call of Duty, Ellen Page dans Beyond Two Souls, Rami Malek dans Until Dawn …), dans la publicité (la FDJ, l’Oréal…), ou encore dans l’événementiel (concerts, spectacles …).
La motion capture capte les mouvements dans l’espace à partir d’un acteur bien réel, pour ensuite les retranscrire sur un modèle virtuel en 3D. Ce modèle peut autant prendre les traits d’un animal que d’un humanoïde, comme les chimpanzés dans le film La Planète des Singes, ou encore les Na’vi d’Avatar. On l’utilise de plus en plus dans les films qui ont pour volonté d’être réaliste, afin de justement accentuer l’effet de réalisme et accompagner les Modélisateurs 3D dans leurs animations.
Il faut savoir qu’à l’origine la motion capture a été inventée à la fin du XIXe siècle. Les premiers tests ont été faits à travers l’étude des mouvements d’un cheval au galop avant d’être projetés sur écran. A la base, la motion capture en 3D a été conçue dans les années 1970 pour la recherche scientifique. A ce moment-là, on s’en servait pour animer des personnages humains sur ordinateur qui se sont révélés être une source très complète à étudier, principalement dans le domaine de la santé et de l’anatomie.
Le Pôle Express, sorti en 2004, fut le premier long métrage réalisé entièrement avec cette technologie.
Comment fonctionne la Motion Capture ?
La motion capture est basée sur un système de données où les mouvements captés vont être transformés en animation. La captation du mouvement, techniquement parlant, peut être divisée en 5 étapes distinctes :
- Préparation du studio
- Calibration de la zone de capture
- Captation des mouvements
- Nettoyage des données
- Traitement des données
Vers les années 1980, la motion capture fonctionnait avec des capteurs attachés à une sorte d’exosquelette porté par un humain. De nos jours la méthode la plus utilisée et la plus connue est celle des traceurs optiques. Des détecteurs enregistrent la position de marqueurs en 2D, puis un logiciel combine l’ensemble des données pour déterminer les positions des marqueurs dans l’espace et leur trajectoire.
Il existe certaines techniques utilisées de nos jours qui poussent le réalisme encore plus loin comme la performance capture, qui se concentre sur les expressions du visage afin de capturer un maximum d’émotions dégagées par l’acteur. Les marqueurs sont alors directement placés sur le visage de l’acteur afin de capter plus en détail les mouvements de sa bouche, son nez, ses joues, son front, etc.
Il existe d’autres techniques consistant à augmenter le réalisme de la motion capture le plus possible :
- Capture optique : on place les capteurs sur des zones stratégiques de l’acteur, c’est la méthode la plus utilisée.
- Capture gyroscopique : les capteurs sont remplacés par des capteurs gyroscopique et inertiel qui permettent de capter en temps réel l’angle et la position du corps.
- Capture mécanique : très précise, cette méthode se base sur un exosquelette construit autour de ce qu’il faut capter
- Capture magnétique : on mesure le champ magnétique de basse fréquence des capteurs
De Gollum à Mowgli, la Mocap plus que jamais ancrée dans l’univers du cinéma
L’évolution de la performance capture en 20 ans a été assez spectaculaire. D’après Andy Serkis, à l’époque du Seigneur des Anneaux (2001) c’est le terme « motion capture » qui était utilisé. Mais ce terme est de nos jours de moins en moins utilisé pour laisser place au terme « performance capture » .
A cette époque, les mouvements de l’acteur étaient limités, il ne tournait pas sur le plateau en lui-même mais dans une pièce confinée et éclairée d’une certaine manière pour améliorer le rendu. Dès 2003 avec la sortie du dernier film de la trilogie, Le Retour du roi, l’équipe du film a pu se permettre de filmer une poignée de séquences sur le vrai plateau « où les caméras pouvaient être déplacées plus amplement » (Andy Serkis).
Avec le film King Kong sorti en 2005 et réalisé par Peter Jackson, la « performance physique » de l’acteur en motion capture était née. Les mouvements du corps de l’acteur étaient enregistrés en même temps que les expressions de son visage grâce à la combinaison portée qui lui donnait la carrure du singe en question. C’est pendant ce film qu’il pouvait réellement utiliser son corps pour jouer.
En 2009, Avatar, réalisé par James Cameron, a marqué une véritable révolution pour la motion capture dans l’univers du cinéma. C’est dans ce film que l’utilisation des caméras accrochées devant le visage des acteurs a été démocratisée. Les acteurs pouvaient alors jouer tout en se déplaçant dans un vaste environnement qui allait être transformé numériquement. L’enregistrement de l’expression faciale était bien plus détaillé.
En 2011, avec le remake de La Planète des Singes l’équipe du film pouvait filmer en intérieur ET en extérieur ; « le premier film, toute la performance capture a été enregistrée sur le plateau, mais pour le deux (2014) et le trois (2017), on a pu sortir et tourner dans des décors différents : la plage, la forêt… » raconte Andy Serkis.
Il est clair que la performance capture a énormément évolué au fil des années, portée par des projets ambitieux et par des gens passionnés cherchant toujours plus de liberté dans le jeu d’acteur et essayant de repousser les limites de cette technologie, de sorte que le jeu de l’acteur derrière le personnage en numérique soit retranscrit le plus fidèlement possible.
Et après ?
Repousser encore plus les limites de cette technologie, en offrant aux acteurs encore plus de liberté de mouvement, en faisant en sorte d’élargir le champ des possibles au niveau des environnements exploitables par la performance capture. James Cameron serait en train d’exploiter la motion capture sous l’eau pour les deux prochains volets d’Avatar. Autant dire que la performance capture ne cessera pas d’évoluer de ci-tôt !