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“Échanger l’argent contre un rêve”, ça vaut le coût ? : Anaïs MVA.

Par Alexandre Dubourdieu

Anaïs MVA : entre médecine et musique, la double vie d’une figure inspirante de la pop francophone. 

Concilier des aspirations différentes, voire opposées, c’est ce que la chanteuse Anaïs MVA s’efforce de faire : étudiante en médecine à Bruxelles et autrice-compositrice-interprète, elle jongle entre les salles de cours et les salles de concert avec une aisance déconcertante.

Violoniste pendant dix ans, autodidacte au piano et à la guitare, elle a su conquérir un large public pour se faire sa place dans le monde de la pop francophone. 

Aujourd’hui, à seulement 22 ans, elle a rempli des salles prestigieuses comme La Maroquinerie ou La Cigale. Son parcours atypique, alliant études exigeantes et carrière artistique audacieuse, est une source d’inspiration pour les étudiants en quête de sens.

Des choix professionnels souvent déchirés entre passion et raison.

Rien ne prédestinait Anaïs MVA à une carrière musicale. Issue d’une famille de professeurs, elle se tourne initialement vers des études scientifiques, tout en cultivant une passion pour la musique depuis l’enfance. 

Cependant, elle n’ose d’abord pas en faire une profession, notamment pour des raisons sécuritaires. L’artiste, qui vient d’une famille modeste, a en effet toujours eu conscience de l’importance de s’assurer un avenir financièrement stable. Si elle sent bien être animée par la musique, elle a longtemps refoulé son rêve d’enfance, celui de devenir une chanteuse à succès.

Beaucoup d’étudiants sont confrontés à un dilemme similaire : comment concilier passion et raison ? Se lancer dans un domaine qui nous anime vraiment ou privilégier stabilité et sécurité professionnelle ? 

Autant de questions qui traversent l’esprit des jeunes en école de commerce, souvent tiraillés entre carrières traditionnelles et aspirations plus créatives ou entrepreneuriales. Face à ces doutes, Anaïs MVA nous apporte une perspective enrichissante.

Anaïs MVA, Sony Music

“8h sonne” : l’illusion des études lucratives

«L’amphi tremble, les gens semblent savoir où aller, mais le savent-ils vraiment ou ont-ils accepté d’échanger l’argent contre un rêve ?». 

Ces quelques mots du son d’Anaïs, 8h sonne, font écho à notre quotidien, guidés par des ambitions de carrières prestigieuses et de maximisation de notre employabilité. 

Mais derrière ces objectifs sacralisés, combien savent vraiment pourquoi ils sont là ?

Il est indéniable que les choix d’orientation sont guidés par des considérations économiques; néanmoins, la quête du salaire le plus élevé possible peut limiter l’importance accordée à des considérations essentielles telles que la vocation ou les affinités personnelles. Elle peut s’avérer être une impasse lorsque l’on se rend compte, quelques années plus tard, que l’on a sacrifié son enthousiasme sur l’autel de la rentabilité.

Oser suivre sa propre voie : un choix qui n’est pas exempt de difficultés…

Anaïs MVA, elle, a fait le choix de faire de sa passion sa vocation. Elle commence à composer ses morceaux dans sa chambre étudiante et décide très simplement de les partager sur TikTok. 

En abordant avec beaucoup d’honnêteté des sujets qui touchent la jeunesse comme l’amour ou l’addiction, elle rencontre rapidement un écho favorable, lui permettant de bâtir une communauté de fans et d’attirer l’attention de l’industrie musicale. 

En janvier 2023, elle concrétise son engagement artistique en enregistrant son premier EP, Métastases, qui compile les compositions partagées sur les réseaux sociaux les plus appréciées par ses abonnés.

Si Anaïs MVA a su transformer sa passion en carrière, elle n’en reste pas moins lucide. Consciente que la musique est un milieu incertain, elle fait le choix de poursuivre ses études de médecine afin de s’assurer un filet de sécurité si elle ne peut plus vivre de son art. 

Loin d’idéaliser un quotidien sans contraintes, elle ne cache pas la difficulté d’un tel équilibre. 

C’est complètement le rush, non, je ne vais pas faire semblant d’être une machine qui gère tout sans souci. Ce n’est pas simple, j’ai des rattrapages tous les ans…”

… Mais qui n’est pas synonyme de risques incommensurables

Néanmoins, la musique apporte paradoxalement à Anaïs une forme d’indépendance financière. Grâce à sa communauté grandissante sur les réseaux sociaux et aux revenus générés par ses concerts et le streaming, elle peut subvenir aujourd’hui à ses besoins sans dépendre de ses parents. 

Contrairement aux idées reçues, elle souligne qu’avec un investissement important et une approche lucide, il est possible de faire ce que l’on aime sans sacrifier son confort de vie. D’ailleurs, son choix de garder un pied dans ses études est aussi une démonstration de pragmatisme. Une approche qui contraste avec l’idée selon laquelle suivre sa passion signifie nécessairement prendre des risques inconsidérés.

Pour Anaïs, l’essor des plateformes numériques a profondément changé la donne pour les artistes émergents. 

«Avec les réseaux, ce n’est plus aussi difficile de vivre de sa passion. Si tu as quelque chose à proposer et que ça touche les gens, il y a moyen de se créer une place.» 

Son ascension en est la preuve : ce qui n’était au départ qu’un passe-temps entre ses révisions s’est métamorphosé en une carrière prometteuse, portée par un public fidèle et une industrie musicale qui reconnaît son talent.

L’expérience d’Anaïs MVA suggère ainsi qu’il est possible de se laisser porter par ses envies tout en gardant les pieds sur terre. Elle rappelle que trouver sa voie ne se résume pas à faire un choix arrêté à un moment précis de sa vie, ou à suivre un chemin tout tracé. 

Au contraire, c’est plutôt apprendre à expérimenter et à composer progressivement avec ses aspirations personnelles sans perdre de vue les réalités du monde professionnel.