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Marketing digital: interview de Charlotte Marie ROHMER

Interview de Pauline Richard

Depuis une vingtaine d’années, les entreprises se sont emparées des nouvelles technologies, au fur-et-à mesure que celles-ci se sont imposées dans notre quotidien. C’est ainsi qu’une nouvelle branche du marketing a émergé : le marketing digital. En quoi consiste réellement cette discipline? Quelle est sa place dans la stratégie d’un grand groupe ? Et comment s’y former à emlyon ? Charlotte Marie Rohmer, étudiante à emlyon et ex-stagiaire de 6 mois au sein de LVMH répond à nos questions.

Peux-tu présenter le stage que tu as fait ?

Charlotte Marie (CM): J’étais en stage de janvier à juillet 2019 chez LVMH, au sein de la maison de champagne Ruinart. Elle appartient à la division M.H de LVMH, donc tout ce qui est vin et spiritueux. Je travaillais au service marketing international, et j’étais plus spécifiquement en charge du marketing digital, avec ma manager qui était responsable à la fois du marketing digital de la maison et du consumer engagement. 

Peux-tu décrire les principales missions que tu as réalisées pendant ton stage ? 

CM: J’avais trois missions principales : gérer le site de la maison Ruinart, ses réseaux sociaux, et un peu de service client. D’une part, en ce qui concerne les réseaux sociaux de la maison, je m’occupais, par exemple sur Facebook, des trois pages de la maison (France, Internationale et Russie, même si cette dernière a plus été gérée par la division russophone du Wine&Spirits). Je travaillais aussi sur les pages Instagram, Twitter et Linkedin de Ruinart. Cela consistait en gérer le planning éditorial des publications françaises et internationales, répondre aux commentaires et aux messages ainsi que gérer les stories. Il était très intéressant de travailler également sur l’analyse des retombées des campagnes sur internet. Ruinart faisait beaucoup de “paid media”, c’est-à-dire créer des publicités ciblées pour une catégorie d’utilisateurs choisis. Cela impliquait une partie création des visuels, et surtout de la promotion d’événements qui se tenaient dans les différents pays où Ruinart était présent. J’étais par exemple en contact avec des équipes en Suisse, au Royaume-Uni, en Belgique, aux Etats-Unis, en Australie car il y avait au moins un événement par mois dans chaque pays, si ce n’est deux voire trois. Nous réalisions, à chaque fois, une campagne de “paid media” correspondante. Je peux, par exemple, citer les Ruinart Sommelier Challenge, un concours dont une vingtaine d’éditions se sont tenues partout dans le monde (Singapour, Hong Kong, New York,…). D’autre part, j’étais aussi en charge de l’adresse mail de Ruinart : je répondais à chacun des mails adressés à la maison. La partie principale de mon stage était, enfin et surtout, de m’occuper du site internet. Cela impliquait de gérer tout le back office du site, et donc un peu de codage, ainsi que l’apparence, le contenu, l’organisation des pages du site. Il fallait s’occuper de tout cela dans les six versions du site (fr, uk, us, it, all,…). Ces dernières étaient soumises à des lois particulières, comme le site français qui est soumis, par exemple, à la loi Evin, ce qui impliquait la création de contenu particulier en fonction des versions du site. 

Quelle place occupe actuellement le marketing digital dans la stratégie de LVMH ?

CM: En tant que première maison de luxe au monde, LVMH considère que le digital est au coeur de l’expérience client, ce qui se ressent dans la maison Ruinart. Ils ont pris le virage du digital en proposant des expériences digitales de plus en plus personnalisées pour leurs clients. Cela est encore plus vrai pour notre génération des “millennials”. Le digital fait vraiment partie intégrante de notre quotidien. Je pense que LVMH montre particulièrement son intérêt pour le digital en participant au salon Vivatech, où j’ai eu la chance d’aller cette année. Beaucoup de maisons étaient présentes et cherchaient toutes à mettre la tech au coeur de leur stratégie, que ce soit avec de la réalité virtuelle ou encore une expérience digitale. A première vue on peut ne pas voir le lien avec Ruinart, plus ancienne maison de champagne de France, et le digital. Pourtant, la maison est très présente sur Internet, a une communauté solide, et investit dans les nouvelles technologies pour attirer plus de clientèle, une clientèle qui change très vite.  

Quelles différences fais-tu entre marketing digital et marketing “classique” ? 

CM: Le marketing digital est difficile à définir car, à mon sens, il oscille entre la communication et le marketing traditionnel. Dans la section marketing international où je travaillais, il y avait, en plus du marketing digital, le marketing développement produit. Ce genre de marketing est plus traditionnel, car il s’agissait principalement de développer, par exemple, les offres des cuvées Ruinart qui allaient être faites, collaborer avec des artistes pour l’image de la maison, créer des nouveaux coffrets, et donc de développer l’offre produit. Tout ce qui relevait plus du marketing opérationnel était l’affaire du marketing France, et ciblé sur des événements pour mettre en valeur les cuvées Ruinart. Les campagnes avaient toujours un aspect artistique car la maison est très investie dans l’art, c’est là où elle fait la différence avec les autres maisons de champagne à mon sens. Ainsi, la maison ne collaborait pas seulement avec des artistes, mais aussi avec des chefs étoilés et des artisans d’art. Enfin, le marketing développement international, en amont du marketing opérationnel, se concentrait vraiment sur l’offre en elle même. Pour résumer, le marketing développement international c’est “qu’est-ce qu’on vend ?”, et le marketing opérationnel c’est “comment les met-on en valeur ?”. Le marketing digital intervient en électron libre pour mettre à la fois en valeur les cuvées lancées et promouvoir les événements en plus.

Pourquoi t’être intéressée au marketing digital ?

CM: À mon arrivée à emlyon, j’avais très envie d’expérimenter une matière liée au business. Ayant fait un master droit à Assas avant, je voulais faire quelque chose de nouveau et de différent. Ce qui m’attirait beaucoup dans le marketing c’était de promouvoir ce que crée une marque. J’avais ni envie de développer un produit ni d’être seulement dans l’analyse des chiffres. J’avais envie d’accroître la notoriété d’une marque, particulièrement au travers du digital. J’avais une appétence particulière pour ce domaine, utilisant quotidiennement les réseaux sociaux et ayant déjà géré un site internet. 

Quelles sont les choses que tu préfères dans ce domaine, et au contraire les choses que tu aimes moins ?

CM: Ce que j’ai préféré, c’était la partie analyse des retombées. C’était très intéressant de comparer le budget investi avec les résultats réels des campagnes, comparer les taux d’engagements en fonction de ce qui avait été promu. J’ai aussi beaucoup aimé la partie définition des campagnes de “paid media”. Nous visions un public de connaisseurs, et tout l’enjeu était de savoir quoi mettre en avant pour les attirer. Néanmoins, il faut avoir à l’esprit que le digital implique d’être très connecté et que le rythme peut être effréné par moment.

Quels cours avais-tu suivis à l’emlyon dans l’optique de travailler dans le marketing digital ?

CM: J’ai suivi les cours de Robert Revat “New Product Development”, où nous avions dû créer en groupe un produit notamment. C’était intéressant de découvrir le développement de produit. J’ai aussi suivi le cours de comportement du consommateur par Lionel Sitz. Chaque semaine nous découvrions comment les marques s’adressaient aux clients selon les industries et le comportement des consommateurs à leur égard, comme avec le placement des produits dans un rayon de supermarché par exemple. J’avais vraiment aimé comprendre comment les marques s’immiscent dans la vie des consommateurs. 

Que conseillerais-tu aux étudiants de emlyon intéressés par cette voie ?

CM: Il faut absolument se renseigner au préalable sur ce que c’est et ce que ça va impliquer. Le marketing digital est un domaine nouveau, donc les définitions et les missions ne seront pas les mêmes en fonction des entreprises. Cela dépendra de nombreux facteurs, tels que le fonctionnement interne de l’entreprise, de son secteur, de sa taille. Ruinart faisait beaucoup de publications sponsorisées, mais d’autres marques vont peut-être plus s’intéresser aux classements des référencements dans les moteurs de recherche, ou encore le trafic du site internet. Chaque marque met l’accent sur un domaine spécifique du marketing digital. Il faut donc que les étudiants sachent quels domaines du marketing digital les intéressent et analyser les offres en fonction de cela.