En 2022 la demande en prestations de conseil n’a jamais été aussi forte. Les organisations, qui se sont retrouvées confrontées à la crise sanitaire et économique, doivent s’adapter et se transformer dans un environnement imprévisible et tendu. Pour répondre à ces changements, nombreuses sont les organisations qui font appel à un cabinet de conseil, dont les consultants apportent un regard externe et précieux. Toutefois, de nombreuses structures décident de mobiliser des compétences internes et recrutent pour former un « pool » de consultants dits internes à l’entreprise. Certaines font par ailleurs le choix d’une hybridation entre une expertise apportée par des consultants internes à l’organisation et une expertise parfois plus spécifique apportée par des consultants externes. Comment expliquer ces choix ? Pourquoi certaines entreprises font appel à des cabinets de conseil quand d’autres recrutent des consultants en interne ?
Par Houssam Nobbigh,
Une question de compétences, mais pas que
En réalité, le choix de l’internalisation ou de l’externalisation du conseil dépend grandement de l’entreprise en question, de sa taille, de son secteur d’activité, de ses fonctions et surtout de ses compétences internes. Afin de déterminer s’il faut mobiliser des compétences internes ou externes, il est nécessaire que les organisations mesurent les compétences, les forces et les faiblesses de leur capital humain. Lorsque celles-ci ne disposent pas des compétences nécessaires pour répondre à une problématique, il semble évident que le recours à un cabinet de conseil s’impose. Toutefois, lorsque les compétences sont détenues en interne, la question d’une externalisation n’est pas à éluder pour autant.
En premier lieu car le rapport vis-à-vis de la mission peut être sensiblement différent en fonction du statut du consultant. Le consultant interne doit répondre à une hiérarchie et est impliqué dans une relation d’autorité existant dans sa structure. Il démarre également avec un capital de relation client – car les salariés sont aussi, ou ont été, des collègues ou des amis. À l’inverse, le consultant externe est « indépendant » et doit répondre aux exigences premières de son cabinet, bien qu’il doive prendre en compte le jeu des différents acteurs. Il doit construire et maintenir la relation client dans la phase commerciale et durant la mission. La distance est souvent de mise pour le temps de la mission : pas de relations amicales avec le client même si la confiance ou le « fit culturel » s’établit.
Un consultant externe apporte un service au nom de son cabinet, le service rendu diffère d’un cabinet à un autre. Chaque cabinet possède sa propre identité, son propre mode de fonctionnement (ses process) et est parfois spécialisé. De nombreuses entreprises font d’ailleurs appel à des cabinets externes dans le but de s’imprégner de leurs méthodes et façons de faire, entre autres. Le consultant externe apporte une expertise de haut niveau dans un secteur mais doit comprendre et intégrer le fonctionnement de l’organisation pour laquelle il mène une mission de conseil. À l’inverse, le consultant interne est déjà imprégné de sa propre entreprise, il en a une connaissance et une compréhension précise, ce qui est un gain de temps et d’énergie non négligeable dans les projets de l’entreprise – même si cela peut mener à une certaine myopie mettant alors en danger la recherche de solutions et le changement. Sa position est en effet paradoxale et parfois compliquée, il doit s’aligner sur les valeurs de l’entreprise tout en ayant le souci constant de l’objectivité.
Un statut et un champ d’action qui diffèrent
Le choix de faire appel à un cabinet de consultants externes dépend des projets d’une entreprise. Si celle-ci souhaite bénéficier d’une vision externe novatrice ou faire du benchmarking, recourir à un cabinet externe lui permet de répondre plus spécifiquement à ces objectifs. En revanche, un consultant interne recommande mais implémente aussi des solutions. Son rôle va au-delà du conseil pour se rapprocher de celui du chef de projet. Le consultant interne s’assure du bon déroulement des projets et veille à la bonne performance de l’entreprise sur le long terme. En ce sens, il a une vision plus pragmatique de la situation même si celui-ci peut se sentir vulnérable étant donné qu’il a vocation à rester dans son entreprise. En effet, la responsabilité de résultat d’une mission lui incombe. Les consultants internes sont plutôt des généralistes du métier ou de la fonction, même si le client interne attend des prestations personnalisées. Tandis que les cabinets de conseil et leurs consultants, les associés en particulier, sont valorisés par le client pour leur haut niveau de spécialisation (sur un secteur, une fonction, un type d’enjeu…). Les entreprises attendent donc d’eux une efficacité importante et visible dès le début de la mission ce qui n’est pas forcément le cas pour les consultants internes.
L’externalisation et l’internalisation du conseil possèdent toutes les deux des avantages et des inconvénients. De nombreuses organisations, de grande taille, mettent en œuvre une collaboration entre consultants internes et externes. Ce mode de fonctionnement hybride permet de faire collaborer des consultants avec des méthodes de fonctionnement différentes et peut déboucher sur un transfert partiel de compétences méthodologiques. De consultant externe à consultant interne, en passant par le format hybride, il existe un frein majeur dans la constitution d’un « pool » de consultants dans les entreprises : le coût. En effet il est plus qu’indispensable de disposer de ressources suffisantes permettant de justifier les postes à temps plein supplémentaires. De ce fait, constituer une équipe de consultants en interne est souvent considéré comme un « luxe » que de nombreuses entreprises plus petites ne peuvent s’offrir.