Fruit du partenariat conclu entre emlyon business school et l’Institut Paul Bocuse, le MSc in international hospitality management ambitionne de former les futurs leaders mondiaux de l’hôtellerie, de la restauration et des arts culinaires. Pour le M, Valentine Candusso Gomez, diplômée d’un bachelor délivré par l’école hôtelière Vatel et actuellement engagée dans le MSc in International Hospitality Management, dévoile les rouages de sa formation et porte un regard avisé sur les enjeux du secteur de l’hôtellerie.
Par Vincent Loeuillet, rédacteur chez Verbat’em
Le MSc in International Hospitality Management, qu’est-ce que c’est ?
Destiné aux étudiants titulaires d’un Bac+4 – avec une dérogation possible pour les détenteurs d’un Bac+3 international, le MSc in International Hospitality Management est un double-diplôme proposé par emlyon business school et l’Institut Paul Bocuse. Il offre un diplôme de grade master labellisé par la Conférence des Grandes Écoles ainsi que le titre RNCP (ndlr : Répertoire national de la certification professionnelle) de niveau 1 délivré par l’Institut Paul Bocuse.
Permettant aux étudiants de bénéficier de l’expertise de deux écoles leaders dans leurs domaines, la volonté affichée du programme est de donner une vision globale du secteur de l’hôtellerie, de la restauration et des arts culinaires ainsi que du management, en alliant théorie, analyse, créativité et cas pratiques. Apprentissage des bases du management et spécialisation grâce à des cours de création d’entreprise, de gestion hôtelière, de design de marque ou de management de l’innovation sont au programme.
Valentine, qui a intégré le programme via l’Institut Bocuse (bac+4), a choisi ce parcours pour plusieurs raisons : « j’ai pris connaissance du double-diplôme avant même d’intégrer l’Institut Bocuse pour ma quatrième année d’études supérieures. Le contenu et la qualité des cours dont je pourrais bénéficier en m’engageant dans ce programme m’ont tout de suite attirée car l’Institut Bocuse et emlyon business school sont de grandes institutions. Je m’attendais à un rythme de cours intense mais aussi à une offre diversifiée. A l’Institut Bocuse, nous devons choisir une spécialisation. En me renseignant, j’ai découvert la spécialisation “lifestyle” dans laquelle je pourrais notamment découvrir l’architecture, faire des plans, découvrir une nouvelle facette de l’Hôtellerie que je ne connaissais pas. Compte tenu des évolutions du secteur, cette spécialisation me semblait particulièrement indiquée. Les autres écoles telles que Ferrandi ou Ferrière sont très portées sur le luxe, milieu que je connaissais déjà du fait de mon bachelor obtenu à Vatel et de mes stages dans des palaces. Enfin, la portée internationale du double-diplôme, qui se déroule dans 3 villes dont 2 à l’étranger, m’a vite séduite. »
Un parcours exigeant, un rythme soutenu
Dispensé sur 18 mois dont 4 à 6 mois de stage, le programme n’offre que peu de répit aux étudiants. Ces derniers intègrent le programme en septembre. « De septembre à décembre nous suivons des cours sur les campus de Lyon. Nos semaines sont divisées pour que nous puissions suivre des cours chez Bocuse et des cours à emlyon. Nous passons, au global, à peu près autant de temps sur chacun des deux campus. A la fin du premier semestre, nous menons un projet final de création de restaurant.
De janvier à mars, nous rejoignons le campus parisien d’emlyon pour un trimestre consacré à l’hôtellerie. Pour la seconde partie du semestre, nous avons le choix entre partir 3 mois à Shanghai, en Chine, pour y étudier le marché asiatique, la culture asiatique et les modes de gestion employés ou bien partir 3 mois aux Etats-Unis, à Las Vegas, pour y découvrir le marché américain, nous imprégner de leurs avancées dans le domaine de l’hôtellerie et nous interroger sur les ressorts de la réussite flagrante de l’industrie.
Pour notre dernier semestre, nous rentrons en France. Plusieurs opportunités nous sont offertes. Nous pouvons nous engager dans un stage de fin d’études, nous insérer sur le marché du travail (CDI ou CDD) ou bien mener un projet de création d’entreprise avec notamment la possibilité de se faire incuber à emlyon (des solutions de financements sont accessibles). Enfin, quel que soit notre choix final, nous devons réaliser un mémoire de fin d’études puis le soutenir devant un jury ».
Les étudiants engagés dans le double-diplôme bénéficient de cours spécialisés et adaptés au secteur de l’hôtellerie. Accessible aux étudiants qui ne sont pas issus d’une formation en hôtellerie, un « parcours accéléré » permet de découvrir le monde de l’hôtellerie de manière intensive, un mois avant le début officiel de la formation. Pour les initiés, ayant déjà eu une expérience professionnelle ou des diplômes dans ce secteur, le « parcours avancé » permet de s’exonérer des cours de « remise à niveau ». Valentine ajoute : « il n’est pas possible de choisir nos cours à proprement parler néanmoins nous avons la possibilité de nous rajouter des cours tels que les cours de langue par exemple ».
Mise en pratique et professionnalisation
Tout au long de la formation, l’accent est porté sur la mise en pratique des savoirs théoriques notamment à travers 3 projets de mise en situation réelle : création d’un pop-up restaurant, développement d’un projet hôtelier et mission de consulting. « Ces projets suivent chaque période d’apprentissage sur les 3 campus visités au cours du parcours. Cela correspond exactement à ce que l’on est en droit d’espérer pour notre dernière année d’études car c’est un programme qui permet d’une part d’approfondir les savoirs existants et d’autre part de les mettre en application au travers de cas d’application très concrets à la fin de chaque semestre ».
Valentine revient sur le projet de création d’un pop-up restaurant, expérience qu’elle a beaucoup appréciée. « A la fin du premier semestre, nous menons un projet de création d’entreprise très concret en groupe. L’objectif final est de proposer un projet de restaurant clé en main. Nous devons créer un restaurant de A à Z. Durant 3 mois, nous devons concevoir un business plan, un budget (800€ nous sont alloués), trouver des fournisseurs, des partenaires, déterminer l’ambiance que l’on souhaite donner à notre restaurant, etc. Cela va de la définition générale du concept jusqu’au détail de l’uniforme, en passant par la musique diffusée ou encore le choix des recettes et le grammage précis des ingrédients. Notre restaurant doit évidemment être rentable, c’est pourquoi l’aspect financier du projet est pleinement optimisé grâce à des calculs de coût. Pour l’approvisionnement, nous bénéficions d’un partenariat avec l’entreprise Metro. Des tuteurs nous accompagnent tout au long du projet. Fin décembre, nous disposons d’une semaine banalisée afin de tester notre restaurant au cours de 4 services, soit 40 couverts, 4 jours de suite en décembre. Chaque équipe peut utiliser les 25 m2 mis à sa disposition dans le local collectif. Ce test grandeur nature nous permet de tester la viabilité du restaurant et la pertinence de notre business plan. Sur ces bases et en considération des remarques reçues, nous concluons ce projet grandeur nature par une présentation du concept devant un jury. »
Un double-diplôme porté sur l’international :
La dimension internationale du cursus est très marquée et se concrétise par un usage quotidien de l’anglais, au sein d’une promotion d’étudiants composée de nombreuses nationalités. « Notre cursus est intégralement anglophone, tous les échanges oraux ou par mail se font en langue anglaise. Nous n’utilisons pas un mot de français. Cette année, 10 nationalités sont recensées dans la promotion. L’usage de l’anglais sert la bonne compréhension de tous. » Le niveau d’anglais est d’ailleurs testé lors de l’admission des étudiants. Ces derniers peuvent joindre le résultat d’un test de langue à leur dossier pour appuyer leur candidature.
Au-delà de l’usage permanent de l’anglais, le parcours se singularise par des périodes d’apprentissage à Shanghai ou à Las Vegas. Les étudiants peuvent ainsi découvrir l’excellence asiatique ou le marché américain et questionner les ressorts de la réussite dans ces lieux reconnus pour leur secteur de l’hôtellerie précurseur. « L’hôtellerie est un secteur international dans lequel les inspirations viennent du monde entier. »
L’innovation au coeur des attentes
L’hôtellerie est un secteur dans lequel l’innovation est dynamique et florissante. Le MSc in International Hospitality Management pousse les étudiants à penser différemment, à sortir des sentiers battus, pour imaginer les nouveaux concepts de demain.
« Dans le cadre d’un projet de fin de semestre, où nous devions pitcher un concept hôtelier, nous avons travaillé avec Mama Shelter (ndlr : Mama Shelter est une chaîne hôtelière française qui a introduit le marché en suivant une stratégie de rupture, en anticipant un marché émergent, celui du tourisme urbain). Le responsable project development a été franc : ‘choquez-nous’ nous a-t-il lancé. Nous devions sortir des clous, ne pas nous restreindre, ne pas recycler une idée lambda. Les générations d’aujourd’hui ont des envies différentes, des envies de nouveauté. Le cursus nous pousse à innover et à intégrer le digital dans nos projets ».
Selon Valentine, l’une des singularités du double-diplôme se trouve ici : « chez Ferrandi ou Ferrière, on nous met dans une boîte, on programme notre réflexion tandis que chez Bocuse, il n’y a pas de petits devoirs qui s’apparentent à des restitutions sans réflexion. Nous créons, nous travaillons de façon professionnelle et avons beaucoup d’oraux ».
Et après ?
Ce programme ouvre la voie à de multiples perspectives de carrières selon l’organisation générale de la structure : direction générale & d’unités, direction marketing & E-business, direction financière, management de projet et développement, etc. Valentine rappelle que le secteur de l’hôtellerie est très vaste : « aujourd’hui, il y a une multitude d’opportunités pour qui veut travailler dans ce secteur, que ce soit dans un hôtel ou bien à l’extérieur, dans des entreprises spécialistes du secteur, sur des postes de marketing, de design, d’architecture, ou encore de conciergerie. L’hôtellerie est un secteur qui travaille avec beaucoup d’autres domaines ».
Le secteur de l’hôtellerie face aux enjeux de demain.
Pour conclure cette présentation du MSc in International Hospitality Management, nous avons demandé à Valentine de porter un regard sur l’évolution du secteur et les enjeux qui en découlent.
Selon toi, quelles sont les grandes évolutions à l’œuvre dans le secteur et les enjeux qui en découlent ?
« Selon moi, tout le monde doit se réveiller. On remarque que la conscience environnementale et sociale des clients ne cesse de s’intensifier, et leurs exigences avec. Demain, celui qui ne se préoccupe pas de la planète, qui perpétue des pratiques d’il y a 10 ou 20 ans est condamné. Les hôtels devront répondre à la problématique de « l’instagrammabilité » tout en préservant la planète et en étant vertueux.
J’ajoute également l’importance de l’aspect humain et du contact. La relation entre employés et clients se trouble de plus en plus. Je pense que demain, les hôtels mettront en avant des employés qui sont serviables, comme ils se doivent toujours de l’être, mais qui seront également très « humains » en offrant au client un contact personnalisé. Nous allons vers une humanisation du système. Cela passe par un effort des hôteliers. Un employé tatoué ne posera certainement plus de problème et sera même très apprécié par certaines marques.
D’autre part, on observe l’importance croissante de l’expérience du client. On parle beaucoup de luxe expérientiel mais l’expérience ne se résume pas au luxe. Les gens ne veulent pas seulement qu’on leur serve des petits fours, ils veulent ressentir quelque chose. Quand ils partent à Cuba ou Bali , ils souhaitent s’imprégner de la culture du pays. Ils peuvent le faire de façon luxueuse ou de façon « roots », mais cette volonté de s’imprégner de la culture et du pays qu’ils visitent est prégnante. »
Comment se manifeste le digital dans le domaine de l’hôtellerie ?
« Cela se manifeste de maintes façons. Le digital est aujourd’hui présent sur l’intégralité du parcours client, de la prise d’informations au commentaire de satisfaction et aux recommandations. Aujourd’hui, personne ne réserve un séjour sans recherches préalables sur Instagram ou sur des sites spécialisés tels que Booking. La réservation qui suit est de plus en plus digitale, via internet, service que propose la majorité des hôtels. A son arrivée à l’hôtel, le client effectue un check-in plus ou moins automatisé (qui peut être préparé à l’avance sur internet via le téléversement des pièces requises). De plus en plus d’hôtels s’équipent de « concierges robots » qui fluidifient le check-in.
Au cours du séjour, le client peut disposer d’une ligne téléphonique directe vers la conciergerie, d’un service courrier, et sélectionner des services sur une application par exemple. Aujourd’hui, certains concierges n’utilisent que Whatsapp pour les communications avec leurs clients. Les relations sont plus naturelles, parfois amicales.
A la fin du séjour, le check-out peut se faire en ligne, très rapidement. Beaucoup d’hôtels proposent un service de fast check-out : le client règle sur internet, peut consulter sa note de séjour et n’avoir plus qu’à déposer ses clefs dans un réceptacle à son départ. Après le séjour, de nombreux hôtels envoient des newsletters à leurs clients ou demandent un retour d’expérience. Ainsi, bien avant et bien après le séjour effectif du client, le digital est présent dans l’expérience client. »
Tu nous as parlé d’une conciergerie robotique, sans intervention humaine. Cela n’est-il pas contradictoire avec l’impératif de contact humain nécessaire aux hôtels pour répondre aux enjeux à venir, que tu as évoqué précédemment ?
« C’est en effet un sujet controversé. Nombreux sont ceux qui s’opposent à la conciergerie robotique. Je ne suis pas une grande défenseuse de cela non plus. Je me range du côté de ceux qui pensent qu’un robot ne remplacera jamais un humain. Toutefois, les entreprises qui utilisent la conciergerie robotique le font non pas dans l’objectif de remplacer les humains mais dans l’objectif de les soutenir et de les délester des tâches chronophages qui peuvent être automatisées pour privilégier, in fine, le contact humain. En guise d’exemple : dans un hôtel quelconque, pour un check-in normal devant durer 15 minutes, le concierge qui prend habituellement 15 minutes pour réceptionner les pièces d’identité du client aura consommé l’intégralité du temps alloué pour un check-in normal. Or, si la conciergerie robotique s’occupe de réceptionner les pièces d’identités du client en 5 minutes, le concierge pourra, lors des 10 minutes sur 15 restantes, s’entretenir avec le client, le conseiller, lui présenter la ville, etc. Une utilisation en ce sens de la conciergerie robotique est souhaitable. Ce que je j’apprécierais autrement moins, c’est d’être servie à table par un robot, que le room service soit entièrement robotisé, etc. Cela ne me convainc pas ».
Quels conseils donnerais-tu aux étudiants souhaitant s’engager dans ce programme ?
« Je leur dirais d’être créatif, d’être attentif aux évolutions du secteur, d’être preneur des savoirs transmis car parfois on ne voit pas les implications immédiates de ces savoirs mais ils peuvent nous servir plus tard. Il faut être ouvert, travailler, montrer des aptitudes au travail en groupe. Le domaine de l’hôtellerie est un secteur qui ouvre plein de portes, qui permet d’espérer de belles choses, notamment à l’international ».